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·15. Juni 2025

Pourquoi la formation ITALIENNE ne produit plus de grands DRIBBLEURS ?

Artikelbild:Pourquoi la formation ITALIENNE ne produit plus de grands DRIBBLEURS ?

Comme le raconte Ultimo Uomo, vendredi soir, en plus de raviver les souvenirs douloureux d’une élimination en Coupe du Monde, de nombreux Italiens ont découvert un certain Antonio Nusa. Cet ailier norvégien du RB Leipzig, rapide et insaisissable, a surpris ceux qui s’attendaient uniquement à affronter Haaland ou Ødegaard. Nusa a été un cauchemar pour la défense italienne, posant une question amère : comment se fait-il que la Norvège produise un tel talent offensif, alors que l’Italie ne dispose d’aucun dribbleur depuis Del Piero ?

Dans le onze italien aligné par Spalletti à Oslo, le joueur le plus performant en dribble selon Hudl StatsBomb était Barella, avec seulement 0,85 dribbles réussis par 90 minutes, le classant 66e en Serie A. Nusa, lui, en a réussi 4 sur 6 en un seul match.


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Ce n’était pourtant pas une surprise pour ceux qui ont suivi les derniers Championnats d’Europe U21 : Nusa et Oscar Bobb avaient déjà brillé contre l’Italie, éliminée par la Norvège après une action décisive du jeune ailier. Ce match résumait bien les limites structurelles du football italien.

Pourquoi l’Italie ne produit-elle pas de dribbleurs ?

Le problème ne se limite pas à un manque de joueurs techniques. Il est systémique, lié à des choix structurels et culturels dans la formation et la sélection des joueurs en Italie.

1. Les profils favorisés en Italie

En Italie, certains types de joueurs sont favorisés :

  • Défenseurs centraux qui sortent fort sur l’homme.
  • Milieux « de course », puissants, capables de couvrir beaucoup de terrain.
  • Ailiers de couloir très athlétiques, souvent plus puissants que techniques.

Le système en 3-5-2, omniprésent en Serie A, reflète cette culture : peu d’espace pour les ailiers créatifs ou les dribbleurs de couloir. Ce système favorise les « cinquièmes » (pistons) qui courent et défendent, au détriment des profils techniques. Même les rares joueurs comme Zaccagni ou Orsolini, pourtant parmi les meilleurs dribbleurs de Serie A, n’ont jamais eu une vraie chance avec la Nazionale.

Ce choix tactique est également dicté par la pauvreté économique des clubs italiens. Faute de moyens, les entraîneurs cherchent à maîtriser tous les paramètres du jeu, avec des systèmes rigides et des profils de joueurs facilement « contrôlables ». Les dribbleurs, imprévisibles par nature, sont donc exclus.

2. Le dribble, ennemi du contrôle

Le football italien repose sur l’obsession du contrôle, à la fois défensif et offensif. Le dribble, action individuelle et risquée, va à l’encontre de cette philosophie. Résultat :

  • Les systèmes offensifs sont ultra-codifiés.
  • On privilégie les joueurs qui respectent les consignes à la lettre.
  • Les défenseurs ont plus le ballon que les attaquants, souvent cantonnés à des tâches de placement pour créer de l’espace.

Un joueur qui prend des initiatives balle au pied est souvent vu comme dangereux… pour sa propre équipe.

3. Des talents techniques sans “complément”

L’Italie ne manque pas totalement de talents techniques : Pafundi, Baldanzi, Maldini, Oristanio ou Volpato sont tous de bons dribbleurs. Mais ces joueurs n’ont pas les qualités “complémentaires” nécessaires pour percer au plus haut niveau :

  • Ils manquent de puissance physique.
  • Leurs choix dans les derniers mètres sont souvent inefficaces.
  • Ils n’ont pas l’impact global requis pour justifier une titularisation.

À l’opposé, même les dribbleurs qui s’imposent – comme Zaccagni ou Orsolini – ne dépassent jamais un certain plafond : celui des clubs de milieu de tableau.

4. L’écart trop grand entre jeunes et professionnels

En Italie, le gap entre football de jeunes et monde professionnel est immense. Les meilleurs jeunes (comme Delle Monache ou Liberali) finissent souvent en Serie B ou dans les équipes Primavera, sans jamais réussir la transition vers l’élite.

Les autres pays ont su mieux gérer ce passage, en construisant des ponts plus efficaces entre formations de jeunes et football pro. L’Italie, elle, garde ses jeunes à l’écart, préférant des joueurs « mûrs », fiables, souvent étrangers ou d’un autre profil.

5. Racisme et clichés physiques

Certains estiment que les pays multiraciaux comme la France ou la Belgique produisent plus de talents physiques « naturellement ». Ce préjugé raciste, encore entretenu (y compris par Spalletti parlant de « muscles africains »), est infondé scientifiquement, mais continue d’influencer les choix.

Des joueurs issus de l’immigration, comme Gnonto ou Kayode, existent aussi en Italie. Mais même ceux-là ne changent pas le visage du football italien : Gnonto, par exemple, souffre des mêmes limites que les autres jeunes dribbleurs.

6. Moins de football de rue, plus de sélection sociale

L’Italie a vu une privatisation des écoles de foot et la disparition du jeu de rue, ce qui limite l’émergence des talents issus de milieux populaires. Le foot devient un sport « fermé », où seuls ceux qui peuvent payer leur formation ont une chance.

Cela a un double effet négatif :

  • On perd des talents « bruts », souvent révélés dans la rue.
  • On accentue les inégalités sociales dans l’accès au football.

Vers un changement possible ?

Des réformes ont été tentées via les sélections jeunes dirigées par Maurizio Viscidi, mais elles ne suffisent pas. L’Italie aurait besoin d’une révolution comme l’Allemagne après 2000, l’Angleterre post-2010, ou la Belgique.

Mais un tel changement demande :

  • De revaloriser les profils créatifs.
  • D’adapter les systèmes pour favoriser l’expression individuelle.
  • D’offrir plus d’opportunités aux jeunes.
  • De modifier l’écosystème du recrutement, trop opaque et dominé par des logiques économiques.

Conclusion

L’Italie ne manque pas totalement de talents, mais elle ne les cultive pas, ne les valorise pas, ne leur donne pas confiance. Le problème des dribbleurs est le symptôme d’une crise plus profonde, culturelle et structurelle. Pour renaître, le football italien devra faire des choix courageux, au-delà des résultats immédiats : changer les mentalités, ouvrir le jeu, faire confiance à la créativité.

Et surtout, arrêter de croire que produire un Antonio Nusa est une chose impossible. Parce que ça ne l’est pas.

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