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·17 mars 2025
EXCLU - Mehdi Amri : « Lamine Yamal était abonné à mon compte Instagram »

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·17 mars 2025
À l’occasion du tirage au sort de la CAN 2025, Onze Mondial s’est rendu à Rabat, au Maroc, où l’on a croisé Mehdi Amri. Véritable star des réseaux sociaux (3 millions d’abonnés sur Instagram), le freestyler multiplie les vidéos pour régaler sa communauté, mais également pour valoriser son pays. De sa formation à Malines à la Coupe du Monde au Qatar en passant par sa roulette infligée à Zinedine Zidane, le génie marocain déballe tout.
Voici quelques extraits de notre interview de Mehdi Amri. L’intégralité de cet interview de 2 pages est à retrouver dans le magazine n°370 de Onze Mondial disponible en kiosque et sur notre eshop depuis le 20 février 2025.
Comment es-tu tombé dans le football ?
Mon père est un ancien joueur de football professionnel. Il a joué en troisième division en Allemagne, en Bundesliga 3. Quand il évoluait au Maroc, il a été recruté là-bas. Le foot, c’est de père en fils, c’est une affaire de famille chez nous. J’ai commencé très tôt, à Malines, un club de première division. J’y étais de mes 6 ans jusqu’à mes 14 ans. Le foot, c’est inné pour moi. Mon père était un bon joueur, un numéro 9. Avant de rejoindre l’Allemagne, il avait deux options : signer à Agadir en première division au Maroc ou s’envoler pour l’Europe. Il a préféré la seconde option pour lancer sa carrière. Par la suite, il est vite retourné en Belgique.
Et de ton côté, quel est ton parcours ?
À 14 ans, Malines m’a renvoyé parce que je n’avais pas le physique adéquat, j’étais vraiment petit. Durant mes années à Malines, comme j’avais un retard morphologique par rapport à ceux de mon âge, j’ai évolué trois ans avec des joueurs plus jeunes que moi. Ils avaient un an de moins. C’était pour m’aider à me développer. C’était vraiment difficile avec ceux de ma génération à cause de mon gabarit. Tu sais quoi, même avec les plus jeunes, je faisais partie des plus petits. Maintenant, j’ai grandi un peu. Mais si tu regardes des photos de moi à l’époque, tu vas être choqué. Les autres joueurs faisaient quatre têtes de plus que moi. Du coup, Ils m'ont renvoyé. Après, j'ai été dans plusieurs équipes de deuxième et troisième division (KSC Grimbergen, VC Dilbeek et K Rupel Boom FC). Ensuite, je me suis retrouvé à faire du street football. Et j’ai lâché le foot à onze.
Je suppose que tu rêvais de devenir footballeur professionnel, non ?
Évidemment, ça a toujours été mon rêve. Je n‘ai jamais rêvé d'être freestyler (sourire). Si je pouvais revenir en arrière, je travaillerais deux fois plus fort pour devenir pro. Même maintenant, j'en rêve encore. Même si je sais que c'est fini pour moi. Devenir pro, c’était mon rêve, celui de mon père et de toute ma famille. Je n’ai malheureusement pas pu le réaliser. C'est toujours une petite blessure que j'ai en moi. Avec mon activité, je croise souvent des joueurs de foot, j’en parle souvent avec eux. Quand je les vois, je me dis : « J’aurais aimé être footballeur aussi ». Tu sais, j’ai oublié, j’ai même été Community manager pour le club d’Anderlecht. J’avais des horaires de bureau, j’aidais le club à développer ses réseaux sociaux.
Comment es-tu tombé dans le streetfoot ?
À un moment donné, ma taille me posait vraiment problème, c’était dur. Après Malines, j’ai fait d’autres clubs, mais je ne prenais plus le foot au sérieux. Dès que je pouvais, j’allais sur le petit terrain à côté de chez moi, l’Agora. Je jouais tous les jours, que ce soit avec les gens ou tout seul. J’aimais trop le ballon. Et un jour, j’ai vu une affiche, c’était écrit : « Tournoi de Pana ». Je ne savais pas ce qu’était le Pana. Du coup, je suis rentré à la maison, j’ai pris mon PC et j’ai tapé sur google « Tournoi de Pana » et là, je vois des freestylers comme Sean Garnier, Sofiane Bencok, je vois des techniques de fou. Et là, je dis : « C’est top pour moi ça ». À l’époque, j’étais très technique, c’était ma qualité principale, je misais tout sur ma technique. Tout le monde me connaissait pour ma technique. Des gens me filmaient et postaient des vidéos de moi sur internet. Et elles cartonnaient sur les réseaux déjà. Mais moi, je ne faisais pas attention à tout ça. Du coup, le lendemain, j’ai été au tournoi de Pana. C’était un tournoi de quartier et je l’ai remporté. Après ça, j’ai été au tournoi provincial qui réunissait tous les quartiers, je l’ai aussi remporté. Ensuite, j’ai été convié au tournoi de Belgique que j’ai également remporté. En un an, je suis devenu champion de Belgique des moins de 15 ans, sans même m’entraîner. Et là, j’ai dit : « Le freestyle, c’est pour moi ».
Et ensuite ?
Je suis devenu plusieurs fois champion de Belgique. En 2018, je suis devenu champion du monde des jeunes. Par la suite, j’ai basculé chez les adultes, et même là, j’ai tout remporté. Et aujourd’hui, je suis cinq fois champion du monde des petits ponts. Le Pana ressemble énormément au football classique, c’est des 1 vs 1, alors que le freestyle, c’est axé sur les jongles. Moi, je suis un freestyler que tu peux mettre en futsal, en 5 vs 5 ou en 7 vs 7. J’ai encore mon toucher de football. J’ai la vision de jeu, je comprends le jeu.
À l’époque, quel était ton poste ?
J’étais numéro 10. Et quand il y avait un 10 vraiment fort, on me faisait jouer ailier gauche pour rentrer sur mon pied et frapper au but. Je misais tout sur la technique, vraiment. Je ne suis pas un joueur très rapide, je ne suis pas un joueur physique, mais je suis technique. On peut me mettre 99 sur FIFA (sourire). Je ne me vante pas, mais vraiment, techniquement, j’étais au-dessus quand j’étais petit. Au quartier, tout le monde parlait de moi. On me voyait comme la future pépite. Et comme tu sais, la technique ne suffit pas pour être footballeur, il faut bien plus. Du coup, ça n'a pas suivi.
Quelle est ta meilleure anecdote de l’époque ?
Je dirais le jour où Anderlecht a voulu me recruter. Lorsqu’on a joué contre eux, j’ai mis une bicyclette. Les gars d’Anderlecht voulaient me prendre, mais mon père leur a dit : « Non, il est bien à Malines ». Du coup, je suis resté à Malines. Et tu sais, même après avoir été viré par Malines, OH Louvain m’a sollicité. Et mon père a répondu : « Il revient d’une période difficile à Malines, il va jouer dans un petit club pour se remettre en confiance avant de revenir ». Et finalement, je ne suis jamais revenu (rires).
Quels sont les joueurs que tu as croisés durant ton parcours ?
J’ai joué avec Pierre Dwomoh, il évolue aujourd’hui à Watford. J’ai aussi évolué avec Johan Bakayoko, aujourd’hui au PSV. Il était trop rapide, trop explosif, personne ne pouvait l’attraper. J’ai également grandi avec Bilel El Khannouss, c’est un gars de mon quartier, il jouait sur le même terrain que moi. Depuis petit, on savait qu’il allait réussir. Il avait un truc en plus. Rayane Bounida est également un gars de mon quartier. Ça fait plaisir de les voir réussir comme ça.
Aujourd’hui, grâce au freestyle, tu croises de nombreuses stars du football. Quelle est ta meilleure rencontre ?
Je dirais Zidane, je lui ai même mis une roulette (sourire). Ronaldinho a validé ma technique et m’a même applaudi. J’en ai rencontré d’autres, mais eux, ce sont des légendes. Gérard Piqué aussi a reconnu mon petit talent. Je suis en contact avec plein de joueurs, plein de joueurs commentent et regardent mes vidéos, parfois, je vois des notifs de fou, je n’en reviens pas. Mais pour revenir à Zidane, je vais te dire la vérité, je n’ai même pas fait exprès de lui faire la roulette. Il est arrivé et ça s’est fait tout seul. Je n’ai pas pensé à faire une roulette contre le créateur de la roulette. Je n’ai pas réalisé, c’est en rentrant, quand j’ai envoyé la vidéo à deux ou trois personnes, ils m’ont tous dit : « Mais t’as mis une roulette à Zizou, c’est un truc de fou ! ». Et là, j’ai dit : « Mais c’est vrai, j’ai fait une dinguerie ! ». J’ai ensuite posté la vidéo et ça a explosé. La vidéo a fait 40 millions de vues, elle a été partagée par tout le monde. Elle a fait le tour du monde.
Comment a réagi Zidane ?
J’ai eu un retour de son neveu, il m’a dit : « Les gens envoient la vidéo à mon oncle sur What’sApp, il en rigole ». Il ne l’a pas mal pris donc ça va. Je dois le rencontrer prochainement. Je vais lui parler de cette vidéo (rires).
Quels sont tes joueurs préférés ?
Mes joueurs préférés sont Messi et Ronaldinho. Je suis un fan du Barça. J'ai toujours aimé Pogba aussi. Je suis attiré par les joueurs techniques. Ce sont eux qui me font kiffer. Je suis aussi un grand fan de Sofiane Boufal. Je peux également te citer Eden Hazard. Il a réalisé de grandes choses, personne ne peut le nier.
Tu suis à fond la sélection du Maroc ?
Je n’ai pas raté un match de la sélection depuis quatre ans, depuis 2021. Je vais à chaque match, je me rends à chaque événement, je pense que les joueurs en ont marre de voir ma tête (rires). Quand ils me voient, ils disent : « Encore lui, il va faire son contenu, il va faire sa vidéo » (sourire). Je suis branché avec 80 % de l'équipe nationale. J’ai une belle relation avec Bilal El Khannouss. Vu que j’ai grandi avec lui, c’est naturel, ce n’est pas forcé. Depuis tout petit, il vient à la maison, on s’entraîne ensemble, c’est fluide entre nous. Je m’entends aussi avec Ilias Akhomach, j’ai déjà été le voir à Villarreal. J’échange souvent avec Eliesse Ben Seghir aussi. Et plein d’autres. Comme je fais beaucoup de contenus sur le Maroc, les joueurs apprécient et me mettent un petit commentaire ou un j’aime. Ils m’encouragent. Le seul joueur avec qui je n’ai pas de contact, c’est Hakim Ziyech. J’ai déjà parlé avec Achraf Hakimi, mais lui, c’est une big star, il n’est pas facile à toucher (rires).
Tu voulais devenir footballeur, tu n’as pas réussi, mais tu parviens quand même à vivre du football…
Grâce à Dieu, je m’en sors bien. J’ai plein de potes qui voulaient être footballeurs, ils n’ont pas réussi, et aujourd’hui, ce n’est pas facile pour eux. C’est le destin. Tous les jours, je remercie Dieu de m’avoir mis sur ce chemin. Même si j’aurais aimé être footballeur, je dis « Dieu merci ». C’est quand même beau de pouvoir voyager et de faire tout ce que je fais.
Suis-tu l’actualité footballistique ?
Évidemment ! Moi, je suis un faux freestyler ! Quand il faut, je fais du freestyle, mais quand il y a moyen de ne pas en faire, je n’en fais pas. Je kiffe le foot ! J’aime regarder des matchs, j’aime jouer des matchs, faire des fives, je suis un fou de foot. Sur le terrain, je suis un combattant, j’aime la guerre. J’ai récemment participé à la Kings League avec le Maroc. Et même là, les gens ont pu ressentir que j’étais un dingue de ballon. Même si l’aventure a été difficile. C’était un nouveau format pour moi, en 7 contre 7. Moi, je suis un joueur de 5 contre 5. Je n’étais pas un titulaire, du coup, quand j’entrais en jeu, j’avais un peu de pression. Le coach n’était pas un grand fan des dribbles, il voulait qu’on joue en deux touches maximum. Moi, je suis un joueur qui a besoin de toucher le ballon, j’ai besoin que le coach me donne une certaine liberté pour exprimer ma créativité et briller sur le terrain. Je n’ai pas ressenti cette liberté, du coup, je jouais simple. Dans l’ensemble, je m’en suis bien sorti, j’ai marqué, fait des passes décisives, récupéré de beaux ballons. J’ai été dangereux sur quelques actions. J’ai pu montrer de belles choses. Tous les Marocains du monde m’ont validé à travers mes performances, donc ça fait chaud au coeur.
Tu as une certaine notoriété, est-ce plaisant ?
Comme j'ai commencé jeune, je vis avec comme si c'était normal. Ça m’est, un peu, égal. Je fais abstraction de certaines choses. Je suis toujours le même. Mes parents ne réalisent pas. Pour eux, je suis juste Mehdi, je ne suis pas une star. Pour eux, je ne suis pas « Mehdi Amri le freestyler », je suis leur fils, c’est tout. Parfois, ma mère me dit : « Mais quand tu sors, il y a vraiment des gens qui veulent faire des photos avec toi ? ». Je lui dis oui, mais elle ne me croit pas. Par contre, quand elle sort avec moi, elle se rend compte que je suis reconnu.
Quel est ton plus beau souvenir en tant que supporter ?
La Coupe du Monde, la demi-finale. J’étais sur place, j’ai suivi toute la compétition. J’ai même versé des larmes. J’ai pleuré quand ils ont gagné et j’ai pleuré quand ils ont perdu. Et même à la Kings League, quand j’ai perdu, j’ai pleuré. J’aime trop le Maroc, c’est mon pays, c’est un amour infini. Je pense que ça se ressent dans mes vidéos. J’essaie de représenter mon pays comme il le faut, je veux mettre le Maroc le plus haut possible. Il faut être Marocain pour comprendre cet amour.
Comment sens-tu la prochaine CAN qui va se dérouler au Maroc ?
Ça va être une CAN extrêmement relevée, la CAN la plus disputée de l’histoire. Dans tous les pays, une nouvelle génération s’est installée. En Afrique, les joueurs sont très forts. Le football africain commence à se développer. Ça ne va pas être facile pour le Maroc. On a la pression. Tout le monde sait que le Maroc est une grande national du football, surtout depuis la Coupe du Monde. Le Maroc est le grand favori. On va jouer avec la pression et on va la gérer si Dieu le veut. Ce n’est pas facile de jouer à la maison, car on veut gagner cette CAN.
Suis-tu l’actualité de ton club préféré, le FC Barcelone ?
Je reviens de Barcelone, j’ai rendu visite à une petite connaissance qui s’appelle Adam Qaroual. Le Barça et moi, c’est une grande histoire d’amour. Je regarde tous les matchs du Barça. Je suis fan de Lamine Yamal, je kiffe le regarder. C’est un régal d’observer un tel joueur. Il est exceptionnel.
Es-tu en contact avec lui ?
Je vais te raconter une anecdote que personne ne sait. Lamine Yamal et moi étions branchés avant qu’il perce. Il était abonné à mon compte, il likait mes vidéos. Et le joueur où il a choisi l’Espagne, il s’est désabonné de mon Instagram. Il a, peut-être, eu peur d’être lié au Maroc. Comme je fais plein de contenus sur le Maroc, il a sûrement préféré prendre ses distances pour éviter les quiproquos. J’ai encore les screens de ses likes. Ce n’est pas grave, je vais le revoir et lui mettre un petit pont (rires).
Je te laisse le mot de la fin.
J’ai déménagé au Maroc, je souhaite faire de jolis projets au Maroc. La CAN arrive, du coup, j’ai décidé de m’installer sur place. Je compte faire de belles choses, organiser des tournois au Maroc et aider au développement du football marocain. Et pourquoi ne pas prendre le sixième titre de champion du monde de petits ponts. Je n’arrêterai jamais de mettre des petits ponts. Donc ceux qui me croisent, fermez les jambes (rires) !
Propos recueillis par Rafik Youcef
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