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·13 septembre 2025

Interview : rencontre avec Steave Mendy, auteur du livre "Footeux"

Image de l'article :Interview : rencontre avec Steave Mendy, auteur du livre "Footeux"

À l’occasion de la sortie de son livre « Footeux », Steave Mendy est passé dans les locaux de Onze Mondial. L’auteur de cette fiction sportive présente son ouvrage et raconte son parcours. Interview.

Quels sont tes premiers souvenirs de foot ?


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Je suis tombé très rapidement dedans par l'intermédiaire de mon grand frère, Marc. En général, quand t’es le cadet, tu suis un peu les plus grands et ça a été le cas pour moi. Mes premiers souvenirs remontent à Aubervilliers où j’ai commencé le foot à 5 ans. Ça a été une sorte d’addiction : avec mon frère, on lisait tous les magazines, on les collectionnait. Pareil pour les matchs : on regardait tout ce qu’on pouvait, parce qu’on n’avait pas Canal, donc ce n’était pas évident de voir beaucoup de matchs. C’était une époque où il n’y en avait pas autant qu’aujourd’hui. C’est un sport pour lequel je serai toujours reconnaissant parce que toutes mes expériences professionnelles étaient et sont encore liées au foot.

Pourquoi avoir écrit Footeux ? D’où t'est venue l’idée ?

C’est venu d’une discussion avec Nicolas Laquerrière (écrivain et co-scénariste de Validé). Un jour, je me baladais à la FNAC et je suis tombé sur un livre qui s’appelle « KICHTA ». Je l’ai acheté et j’ai bien aimé l’écriture. Je lui ai donc envoyé un message sur les réseaux sociaux pour lui dire que j’avais apprécié le livre, et finalement, on s’est mis à discuter et je lui ai dit que j’aurais aimé voir un livre de foot écrit de la sorte. Il m’a tout simplement conseillé de le faire, sans me soucier de quoi que ce soit, même si je ne suis pas écrivain de profession. Je l’ai écrit dans le but d’inciter les plus jeunes à la lecture, pour qu’ils se disent que lire un livre n’est pas si chiant que ça. Quand j’étais au collège, on nous imposait des livres qui ne me parlaient pas, donc je perdais rapidement le fil et je pense que c’est ce qui arrive à beaucoup de jeunes actuellement.

C’est ton premier livre : quel a été le moment le plus difficile dans l’écriture ?

Il y en a eu plusieurs, sachant que je ne suis pas écrivain. Il a fallu trouver un style d’écriture, penser à un scénario crédible. Et vu que je le sors en indépendant, il n’y a pas de maison d’édition derrière moi, ce qui complique un peu plus la tâche. Ensuite, il a aussi fallu trouver un juste milieu, car j’ai voulu montrer les choses négatives que peuvent subir les joueurs, mais aussi mettre en avant certains mauvais comportements qu’ils peuvent avoir et qui ont des répercussions sur leur carrière. Écrire un roman, c’est comme faire un gigantesque puzzle. Ça m’a pris un an pour le faire, et je ne vais pas te mentir, à plusieurs reprises, je me suis demandé pourquoi je m’étais lancé là-dedans (rires).

Qui est Ryan Kabamba, ton personnage principal ?

C’est un jeune joueur de 21 ans qui évolue à Auxerre. Il a grandi à Aubervilliers avec ses deux parents et sa sœur. Bien qu’ayant baigné dans une ville à la réputation peu glorieuse, il n’a jamais manqué de quoi que ce soit. Il est issu de la classe moyenne et a eu une enfance tout à fait normale. Je ne voulais pas rentrer dans le cliché du joueur banlieusard qui a grandi dans la galère. Je pense qu’il faut cesser avec ce narratif : la plupart mangeaient correctement et avaient la Play à la maison.

Justement, n’est-il pas trop dur d’écrire un livre sur le foot sans rentrer dans des clichés ?

C’est vrai, j’ai oublié de le mentionner parmi les difficultés que j’ai pu rencontrer. Et c’était clairement dur, mais par moments, j’étais obligé de rentrer dans des clichés, car certains sont réels, il ne faut pas se mentir. Là aussi, il a fallu trouver un juste milieu, tout comme dans les dialogues : il fallait alterner entre le langage des jeunes et un langage un peu plus classique, car ça reste un livre.

À quels obstacles le joueur est-il confronté ?

Durant son parcours, il est confronté à toutes sortes d’obstacles : son changement soudain de statut social, son rapport à l’argent qui a changé. Il devient célèbre, le regard des gens est différent, parfois malveillant. Son rapport aux femmes n’est plus le même, il fait face à l’hypocrisie dans le milieu du foot. Mais son plus grand obstacle, c’est lui-même : il se cherche dans un monde de requins où il est constamment sollicité et il ne sait pas à qui il peut faire confiance.

Qu’est-ce que ton livre révèle sur le monde du football ?

Il révèle sa dureté, son injustice. Beaucoup de personnes pensent que c’est une vie de rêve, mais je ne pense pas que ce soit le cas. Il y a beaucoup de joueurs qui souffrent en silence, mais dans ce milieu, il est très difficile de se plaindre, car ils sont vus, et à juste titre, comme des privilégiés. Donc parler de leurs difficultés serait mal perçu aux yeux du grand public. Beaucoup de familles sont déchirées à cause du foot : des parents peuvent menacer leur propre enfant à cause de certains choix, majoritairement liés à l’argent.

Est-ce que certaines scènes s’inspirent de faits réels ?

Bien évidemment, j’ai vécu certaines scènes aux côtés de joueurs et pour les autres, ce sont des témoignages que j’ai pu entendre ou lire de la part des footballeurs.

Un jeune joueur doit-il lire ton livre pour éviter certains pièges ?

Ce serait prétentieux de dire qu’en lisant le livre il évitera certains pièges, mais je pense que ça pourrait le faire cogiter et lui apporter des éléments de réflexion. Il pourra se demander ce qu’il ferait s’il était à la place du joueur à certains moments. S’il se pose des questions, ce sera déjà une réussite pour moi. C’est la raison pour laquelle j’ai contacté certains responsables de scolarité dans des centres de formation pour qu’ils puissent le faire lire aux jeunes joueurs et pourquoi pas échanger avec eux par la suite.

Tu as travaillé comme attaché de presse indépendant pour des joueurs de Ligue 1 : que t’a appris cette expérience ?

J’en ai retenu qu’il y a énormément de paramètres pour mener à bien une carrière. C’est cliché ce que je vais dire, l’entourage est le facteur le plus important, mais comment peut-on savoir, à 21 ans, que son entourage est foncièrement bon ou pas ? C’est très difficile à savoir, certaines personnes, plus âgées que le joueur, sont très bonnes dans la manipulation, et dans le même temps, certains joueurs aiment entendre ce qui les arrange. Avoir de la maturité à un jeune âge, tout en étant millionnaire avec beaucoup de gens à tes pieds, est difficile. Mais tout n’est pas négatif dans ce milieu, j’ai pu rencontrer de très belles personnes.

Qu’est-ce qui t’a le plus marqué dans les coulisses du foot pro ?

Il consomme beaucoup d’énergie. Je me rappelle d’un séjour à Marseille : j’y avais passé trois jours avec un joueur de l’OM et j’étais revenu complètement carbonisé alors que je ne suis même pas joueur (rires). L’environnement de certains clubs est énergivore et il faut vraiment avoir les reins solides pour être performant sur la durée. Honnêtement, je sais que je n’aurais jamais eu le mental pour devenir footballeur de très haut niveau. Chacun de tes faits et gestes est surveillé. Maintenant, tout le monde a un téléphone et, avec les réseaux sociaux, ça va très vite. Je suis quelqu’un de très discret dans la vie ; toute cette attention m’aurait rapidement saoulé. Et le pire dans tout ça, c’est que tes performances sont remises en question tous les trois jours… par des gens qui sont moins bons que toi dans 90 % des cas.

Est-il envisageable que Footeux devienne un film ou une série ?

Honnêtement, j’y ai pensé plusieurs fois, car j’insiste, les gens lisent de moins en moins, surtout la cible que je cherche à atteindre, à savoir les jeunes. J’aimerais bien que ça le devienne un jour, car ça permettrait de mettre en avant pas mal de choses et pourquoi pas faire découvrir de nouveaux talents à l’écran. Car il y en a beaucoup en France, mais on ne les voit pas par manque d’opportunités. Pourquoi ne pas faire tourner des jeunes qui étaient en centre de formation et qui n’ont pas été conservés. Ils connaissent le milieu, donc les scènes seraient plus faciles à tourner et plus authentiques je pense.

As-tu déjà eu des retours de joueurs ou de clubs ?

Pas de clubs pour le moment, uniquement de la part de joueurs et de personnes du milieu. C’est globalement positif, ce qui me soulage, après il y a aussi eu des critiques, mais très constructives car elles étaient plus axées sur la forme que sur le fond. Mais bien évidemment je m’attends à quelques critiques, car je ne suis pas du tout écrivain, ça reste un métier à part, avec ses codes. D’ailleurs c’est mon premier et dernier livre (rires).

Quel ton plus beau souvenir de foot ?

Il y en a trois qui m’ont particulièrement marqué, la victoire du PSG en LDC, je l’ai vécue au Parc et je n’avais jamais vu une ambiance comme ça au stade. Étant supporter du club depuis tout petit, j'ai enfin vécu ce moment. Ensuite, j’ai eu la chance d’être au stade lors de la finale de la Coupe du Monde France vs Argentine au Qatar, je n’ai pas besoin d’en dire plus sur ce match, c’était incroyable, même s’il y a eu une défaite au bout. Et l’évènement qui m’a sûrement le plus touché est la victoire du Sénégal à la CAN face à l’Égypte, un adversaire qui a traumatisé trop de pays en Afrique, en plus j’avais vu ce match avec mon frère et un pote donc ça avait une saveur particulière.

Ton joueur préféré de tous les temps ?

(Sans hésitation) R9. Par contre si tu me demandes entre CR7 et Messi, je réponds Messi.

Si tu pouvais glisser un exemplaire de Footeux à un joueur, ce serait qui ?

(Il réfléchit) Bonne question, je dirais Mike Maignan, parce que j’avais lu une itw de lui et il disait des choses qui ressemblent à ce que j’ai mis dans le livre. Donc je pense que je pourrais avoir une discussion très intéressante avec lui à ce sujet.

Si Footeux avait une bande-son, tu choisirais quel artiste pour la BO ?

Tiakola, SDM ou Leto.

Le mot de la fin ?

Je suis un mec lambda qui a décidé d’écrire un livre (rires).

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