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·15 octobre 2025
L’instant tactique avec Didier Digard : « Pour être le moins lisible possible, il faut être en mesure de se déformer »

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·15 octobre 2025
Après un intérim réussi sur le banc de l’OGC Nice, Didier Digard est retourné momentanément avec le groupe élite. Avant de définitivement lancer sa carrière d’entraîneur dans son club formateur, au Havre. Et pour sa première saison, « DD » est parvenu à maintenir son équipe en Ligue 1 à l’ultime minute de la dernière journée du championnat. Un exploit compte tenu de la situation du club doyen, au goût de trophée majeur. Le technicien de 39 ans a accepté d’être l’invité de notre rubrique « Instant Tactique ». Entretien avec un amoureux du jeu.
La venue dans le foot
Je suis tombé dans le foot tout petit. C'est le premier sport qui m'a attiré, le premier sport que j'ai pratiqué, qui ne m'a jamais quitté, ou plutôt, que je n'ai jamais quitté. Un an et demi après ma retraite, j'ai vite replongé. Je n’ai pas d’explication particulière à tout ça. C'est sûrement le sport où c'est le plus facile de s'intégrer, où tout le monde est accepté, le plus populaire en France. Ça m'a toujours plu et ça me plaît toujours.
L’approche du football
De manière globale, sincèrement, je l'ai toujours vu comme une passion, comme un amusement. Après, évidemment qu'il y a de l’enjeu, qu'il y a une pression particulière. Alors oui, parfois, certains emplois sont en jeu, mais tu ne joues la vie de personne. Ça reste très sincèrement une passion et un jeu qui rassemble beaucoup de monde.
La même approche que lorsque tu étais joueur ?
Avec le temps, on arrive à s'améliorer, à prendre du recul et voir les choses différemment. J'ai plus de recul par rapport à l’époque où j'étais joueur. Par contre, ça reste la même animation au quotidien. J'ai l'impression que je profite plus de ce sport depuis que je suis entraîneur.
Devenir coach, une vocation ?
Non, c'est peut-être pour ça que j'apprécie plus le fait d'être entraîneur que d'être joueur. Parce que pour moi, devenir joueur, c'était logique. Je n'ai jamais eu besoin de galérer pour devenir joueur professionnel. C’était la suite logique, j’ai passé toutes les étapes assez rapidement. Je n’ai pas eu besoin d’aller chercher les choses, en revanche, pour devenir entraîneur, j’ai dû y aller. Devenir entraîneur, c’est sûrement quelque chose que j’avais en moi parce que j'ai toujours été capitaine. Je me suis toujours intéressé au foot. J’aimais regarder le foot, discuter de foot. Mais sincèrement, je ne pensais pas devenir entraîneur.
La plupart des coachs ont un passé de joueur, logique ?
Non, pas du tout. Mon passé de joueur, je m’en sers très rarement. En fait, je m’en sers pour le ressenti, pour juger l’état de mon groupe et anticiper la manière dont ils peuvent recevoir les messages, le feeling qu'ils peuvent avoir. Quand tu donnes une compo, tu sais comment les mecs vont se sentir. Donc, tu essaies d'anticiper un petit peu ces choses-là. Ensuite, pour tout ce qui est purement football, tu as plein de personnes qui n’ont pas été footballeurs mais ont des connaissances très poussées. C'est comme tout. Plus tu te passionnes, plus tu peux devenir bon et avoir de bonnes idées.
Les principes de jeu
Tout le monde a un projet de jeu idéal et après, il y a une réalité, c'est ton effectif. Et ça, c’est le plus important. C'est comme la manière dont tu formes un joueur. Lors de sa formation, le but, c’est de le rendre le plus complet possible. Donc, il y a ce que j'aime beaucoup, bien évidemment, et il y a ce qui est réalisable avec mon groupe aujourd'hui. Et c'est là qu’il faut être le plus complet possible pour s'adapter en fonction de ton effectif. J’aime jouer, j'aime avoir le ballon, j'aime avoir des temps de possession, j'aime que mon équipe, en transition, ait une réaction rapide, qu'elle gagne des mètres, qu'elle ait du courage, qu'elle prenne des initiatives. En fait, j'aime beaucoup de choses parce que je suis un idéaliste. Après, il y a ce que tu peux réaliser. Ce qui me plaît dans mon équipe actuelle, c’est son courage. Même dans les moments difficiles, mon équipe essaie de créer du jeu et d’avoir des idées de jeu. Après oui, la réalisation n’est pas toujours au rendez-vous. Malgré tout ce qui s’est passé, mon équipe s’en est sortie grâce au jeu. C'est cette force de caractère qui m'a plu, car on a toujours gardé cette philosophie et cette volonté de créer du jeu. Pour revenir à la question, mes principes sont les suivants : avoir une maîtrise du ballon, une intelligence tactique, avoir la possibilité de se déformer et de toujours être dominant, de toujours réussir à aller dans les espaces libres. Je veux que mon équipe ait de grosses transitions défensives pour avoir une possession très haute. Après, il y a tellement de principes et de sous-principes… Aujourd’hui, tout le monde veut être le PSG qui a battu l'Inter. Ça faisait très longtemps qu’on n'avait pas vu autant de principes de jeu dans un même match. Pour te donner une réponse précise, j’ai mes principes de jeu avec et sans ballon. Avec le ballon, je demande à mon équipe de rechercher la supériorité numérique dans chaque zone, de créer des deux contre un. Mon schéma peut donc se déformer pour attaquer en supériorité numérique. L’objectif est toujours de rechercher l’homme libre le plus loin possible et de se positionner en attaque placée pour trouver ce même homme libre qui pourra créer le déséquilibre chez l’adversaire. Ensuite, dans le dernier tiers adverse, je fais confiance à l’instinct, la créativité, la magique du footballeur. Sans le ballon, je veux toujours une réaction rapide à la perte pour profiter d’une transition et d’un bloc qui n’est, souvent, pas en place. Je veux que mes joueurs empêchent l’adversaire de prendre de la vitesse. Je demande aussi à mes joueurs d’orienter l’adversaire dans une zone où on peut l’enfermer et être en supériorité. Une fois qu’on a récupéré le ballon, deux options : profiter de la transition ou sécuriser le ballon.
Le schéma tactique préféré ?
Je n'en ai pas. J'utilise beaucoup le 4-3-3, mais pour être le moins lisible possible, il faut être en mesure de se déformer. J'aime le 4-3-3 parce que c'est un système où tu as beaucoup de repères, toutes les zones du terrain sont occupés. Ça te permet d’avoir des repères pour défendre mais aussi pour attaquer parce que tu es étagé. Nous, on veut partir sur des schémas de jeu court sans allonger, avec ce schéma, je sais que j’ai toujours des joueurs entre les lignes. Ça me permet de ne pas allonger, d’avoir un jeu moins direct où tu occupes la largeur. Ensuite, en fonction de comment tu animes la relation entre ton latéral et ton ailier, tu peux le déformer. C'est un système modulable, il te permet, généralement, de créer du jeu sans être trop direct.
Le système le plus équilibré ?
Je pense qu'il n'y en a pas. Encore une fois, c'est le ratio entre les profils de tes joueurs et ton schéma de jeu. Si tu choisis de jouer avec deux milieux, tu sais qu'il faut deux milieux ultra physiques ou avec une maîtrise de balle vraiment très impressionnante. Donc ce n'est pas tout le monde qui peut le faire. De mon point de vue, il n’y a pas le « meilleur » ou le « truc qui marche », sinon, tout le monde ferait la même chose. C'est plus une question d'affinités entre tes idées, le profil de tes joueurs et ce que tu veux mettre en place. C'est au coach d'adapter son système en fonction de ses joueurs. Sauf si tu es dans un club qui te donne les moyens de recruter les joueurs que tu souhaites. Mais le système de jeu, je n’ai jamais été obsédé par ça.
Le système ou les joueurs, quelle priorité ?
Les joueurs, clairement. Il faut mettre les joueurs dans les meilleures dispositions possibles. Si j'ai deux super attaquants, je n'ai aucune raison de m'entêter à jouer en 4-3-3. J'aime tellement réfléchir sur le foot que je ne suis vraiment pas dérangé par le système. Je veux simplement que mes joueurs soient à l’aise et puissent exprimer leurs qualités. C'est comme tout. Le joueur, c'est un être humain et plus tu le rends heureux, mieux il va te le rendre sur le terrain. Additionner le plus de bons joueurs possible sur le terrain et trouver la formule pour que ça fonctionne. Voilà l’idée.
À quelle fréquence tu réfléchis le foot ?
Ce serait plus simple de répondre à la question : « À quelle fréquence je ne réfléchis pas le foot ? » (sourire). Ça ne s'arrête jamais. Le foot, c’est un puit sans fond. Tu peux apprendre de tout et de tout le monde. Je trouve ça fantastique. Si tu es ouvert d'esprit, si tu es quelqu'un qui aime écouter les gens ou qui aime observer, tu apprends tout le temps. La chance qu'on a maintenant, c'est qu'on peut voir ou peut lire des interviews, regarder des reportages ou des matchs du monde entier. Du coup, c'est une source d'apprentissage énorme. Ce n'est pas réducteur, mais moi, j’aime le foot. Je n'ai pas d'autres choses qui m’attirent ou me prennent du temps. Je ne fais que ça.
La différence entre une bonne et une mauvaise tactique ?
C'est celle qui marche (sourire). En fait, le problème, c'est que la tactique, c'est réducteur. Tout le monde va dire : « Ce plan tactique était fantastique ». C'est vrai, ça peut être super bien réfléchi. Mais si la réalisation technique ne se mêle pas à la partie tactique, ça ne fonctionnera jamais. Donc tu peux anticiper beaucoup de choses. Le but, c'est d'avoir un temps d'avance. C'est comme les échecs. Malgré tout, il y a ce qui se passe sur le terrain et là, tu n'es plus décideur de ce qui se passe et de l'adaptation rapide. Sans la technique, la tactique ne vaut rien. L’inverse est vrai aussi. C'est toujours un alliage des choses. Par contre, c'est vrai que la tactique, c'est la partie maîtrisée par le coach, la technique concerne le joueur et ses pieds. Quand on parle de tactique, on l’associe évidemment au coach. Mais ça va tellement plus loin.
Est-ce toujours la meilleure tactique qui l’emporte ?
Bonne question, mais tu as aussi la magie des joueurs, tu as des joueurs capables de changer le cours d'un match et qui, parfois, ne rentrent même pas dans le plan tactique. Toutefois, c’est de plus en plus dur d’avoir des joueurs qui n’entrent pas dans le cadre tactique et à qui on donne une liberté totale. Par contre, tu as encore des joueurs qui ont ce talent de changer un match. On ne peut pas se défausser en disant : « Non, ce n’est pas la tactique, c’est la magie du joueur », car, malgré tout, la tactique, c’est ce qu'on associe au coach, on doit donc l’assumer et le prendre en compte. Ce qui est clair, c’est que la partie tactique, c’est la plus importante pour le coach, c’est celle où l’on doit se donner le plus de moyens et le plus de temps, parce que c'est la seule que nous, on peut maîtriser, et qui est, malgré tout, dépendante de l'adversaire.
La difficulté d’avoir des joueurs « magiques » au Havre
C'est sûr. Et si on en a, ils ne restent pas longtemps chez nous. Pour nous, le but est de trouver des joueurs qui ont une bonne compréhension pour nous permettre d'être le moins lisibles possible. Nous, on est une équipe qui doit toujours changer. Le problème pour les joueurs, c'est d’avoir rapidement des repères. C'est pour ça que la méthodologie de travail est ultra importante, que ton discours doit être très clair. Parce que nous, on doit beaucoup changer. Si on est trop lisibles et qu’on tombe sur un adversaire avec des qualités au-dessus des nôtres, on a très peu de chances de l’emporter. Du coup, la partie tactique est très importante car on ne dépend pas seulement de nous. On doit aussi prendre en considération l’adversaire.
La définition du bon entraineur
Déjà, avant d’être le bon entraîneur, il faut mettre en avant la personne. Tu sais, l'entraîneur, c'est beaucoup de choses. Bien évidemment, tu as cette notion de tactique, tu as la progression de tes joueurs au niveau technique, au niveau de la compréhension du jeu. Tu es aussi jugé sur ta méthodologie de travail. Par exemple : vas-tu réussir à rendre les joueurs contents de s’entraîner grâce au contenu de te séances ? Et sont-ils entraînants justement ? Après, tu as toute la dimension humaine. Comment vas-tu gérer ces hommes qui ont un quotidien, qui ne sont pas que des footballeurs ? Donc, tu dois, si tu veux les amener le plus loin possible, emmener les hommes avec toi, pas seulement les footballeurs. Tu dois prendre en considération tout ça, tout leur quotidien extra-sportif. Savoir les traiter dans un cadre commun, tous différemment, parce que ce sont tous des personnalités différentes. Pour moi, le plus important pour un entraîneur, c'est d'accepter d'être moins important que ses joueurs et de leur laisser la lumière. Ton travail sera reconnu par leur victoire. Il ne faut pas essayer de te mettre en avant, il faut les laisser briller. Le bon entraineur, c'est celui dont ses joueurs disent du bien. Voilà ce qui te reste à la fin. C'est ce que tu as fait ressentir à tes joueurs par les émotions ou par le jeu (il coupe). C'est sans fin, en fait. Être un bon entraineur, c'est comme être une bonne personne. Ça englobe tellement de choses que c'est dur à définir. C'est aussi dépendant de ta personne. Qu'est-ce qui, pour toi, est le plus important ? Est-ce que c'est d'être reconnu par les gens, par les joueurs ou par le résultat ? Pour moi, c'est de réussir à faire progresser ses joueurs et de leur procurer des émotions.
La différence entre le bon et le mauvais entraîneur ?
C'est dur. J’ai plus de difficultés à définir le mauvais entraîneur. C’est une question de philosophie, de manière de voir les choses, de ce qui t’intéresse dans le foot. Est-ce le résultat ou la manière de jouer ? Je n’aime pas perdre, c’est vrai. Mais ce que j'aime encore moins, c'est de mal jouer. Mais ça, c’est une vision personnelle. Du coup, pour moi, le mauvais entraineur, c'est celui qui se tient uniquement par les résultats. Dans le monde actuel, c'est peut-être celui qui va le plus durer aussi. Ce qui est le plus difficile, c’est le positionnement entre l’entraîneur et la personne. Comment vas-tu juger la situation selon ta personnalité ? Du coup, pour moi, le mauvais entraineur, c'est celui qui mise tout sur le résultat. Je dis ça en ayant conscience que je peux fortement me tromper, parce que pour des gens, le résultat, c'est le plus important. Pour des actionnaires qui mettent leur argent, c'est sûrement le plus important, et pour des supporters, c'est peut-être le plus important. Pas pour moi. Moi, je veux rentrer et me dire… (il coupe). Je ne dis pas : « Je veux que mon équipe joue bien », mais je veux qu'elle ait eu les intentions de bien jouer. Je prends évidemment aussi en considération qu’il y a des jours avec et des jours sans.
Peut-on être considéré comme un bon entraineur sans avoir remporté de trophée ?
Oui. Je vois beaucoup d'équipes qui ont un jeu attrayant, un jeu plaisant et qui n'ont pas remporté de trophée. Il y a de très bons entraîneurs qui n'ont jamais gagné de titre parce qu'ils n'ont jamais eu l'effectif pour. Après, il faut aussi regarder la progression de ses joueurs, prendre en compte le ressenti des supporters, toutes ces choses sont à prendre en considération.
La satisfaction pour un coach
C’est quand tu arrives à rendre un groupe de plus en plus autonome. Que les joueurs s’imprègnent des principes de jeu, qu’ils comprennent ce que tu mets en place et qu’ils parviennent à les appliquer automatiquement. Dans certains stades, il y a beaucoup de bruit, c’est difficile de faire passer les consignes. Du coup, quand les joueurs arrivent à lire les situations et comprennent ce qu’il faut faire naturellement, c’est plaisant. Quand tu arrives à créer cette autonomie chez les joueurs, c'est un point de grande satisfaction.
La part de psychologie dans le foot
C’est le point le plus important. Au niveau de l'aspect tactique, tu dois être chirurgical. Tout doit être ultra précis, pointu et bien distribué. C'est un point où tu dois être concentré sur un temps court. Malgré tout, l'aspect humain est une partie très prenante, car on est tous les jours ensemble. Tu as 30 mecs différents, tu dois les emmener et ne pas laisser un grain de sable. Tu passes du temps à gérer l’humain. Pour moi, tu amènes les hommes plus loin que les joueurs. Tu as certains joueurs - et on a eu plein d'exemples dans notre vie - qui n'avaient pas de très grandes qualités, mais qui avaient tellement envie qu'ils ont réussi. L'envie, c'est l'homme. Les qualités, c'est le joueur. Un groupe qui a envie est plus facile à emmener. Cultiver l’envie, c’est un travail au quotidien, tous les jours, limite 24 heures sur 24. La tactique, c'est un petit peu dans la journée.
La gestion humaine
J'ai toujours choisi un fonctionnement très clair avec mes joueurs. Je vais toujours les protéger. Je dirai toujours que de c'est ma faute et je m'en fous de ce que les gens peuvent penser. J’irai toujours en conférence de presse en disant publiquement : « C’est de ma faute ». Par contre, quand on s’enferme ici, au centre d’entraînement ou dans le vestiaire, j’ai le droit de dire à tout le monde et devant tout le monde… (il coupe). Je ne veux pas qu'on ait de secrets entre nous. Je dis tout devant tout le monde. J’ai donc le droit de leur dire leur vérité. Au début, ça pique. Quand tu ne connais pas la personne et que tu apprends à la découvrir, ça pique. Je dis tout devant tout le monde. Je fais ça pour être juste. Je ne veux pas entendre : « Mais moi, il ne m’a rien dit ». Ensuite, on peut s’expliquer en aparté et arrondir les angles si besoin. Mais dans un souci de transparence, pour le bien de mon groupe et pour ne pas perdre mon groupe pour seulement une personne, je fonctionne ainsi. Car tu ne sais jamais ce que va donner l’effet de groupe. Si un joueur n’est pas satisfait pour une parole ou quoi, il peut commencer à chauffer un autre joueur qui ne joue pas trop en lui disant : « Tu as vu, le coach ne fait pas pareil avec tout le monde ». Pour éviter ça, je dis tout à tout le monde et devant tout le monde. C'est beaucoup plus facile de faire accepter les choses aux joueurs en agissant ainsi. Car en plus, il s’agit de joueurs qui jouent. Voilà ma manière de faire. Ensuite, je peux dire ce que je veux aux joueurs. Il ne fait pas bien le week-end, j’assume publiquement que c’est de ma faute. Et en privé, je dis les vérités. Le joueur entend sa vérité devant les 29 autres joueurs du groupe. Moi, je suis exposé devant la presse et le public. Voilà mon mode de fonctionnement. On se dit tout, je suis leur bouclier pour la guerre et il n'y a aucun problème. J’évite les apartés, je pense que c'est dangereux. Mais encore une fois, c'est un fonctionnement personnel. C'est dangereux que le groupe ne soit pas au courant de ce que tu dis à certains. Ça peut créer des fossés, des non-dits, des « peut-être que ». Moi, je préfère que ça pique. Ensuite, passer la pommade. Je veux qu’on avance dans le même sens. Le pacte du début de saison, c'est d'aller tous dans la même direction. Quand tu sais que vous êtes tous ensemble, que vous êtes d’accord, on y va tous. Les entretiens individuels sont rares. Au début, il a fallu un temps d'adaptation. La différence entre ici et Nice, c'est qu’à Nice, les mecs me connaissaient déjà. Ils connaissaient déjà ma personnalité, donc tout a été fluide. Ici, comme c'est un management nouveau, ils n’étaient pas habitués, au début, ça a secoué un peu. Et après, ils se sont dit : « Finalement, il en a quand même pris des belles pour nous. Il n'a pas bougé une oreille. Donc on peut bien écouter quand lui a un truc à nous dire ». Et maintenant, on est comme ça et il y a zéro problème. Les échanges dans mon bureau sont très rares. Ça se passe souvent dans le couloir, le joueur qui s’est fait secouer devant tout le monde, on se croise, un clin d'œil et c'est parti. Les joueurs savent qu’on est ensemble, on n'est pas l'un contre l’autre. La priorité, c'est le bien du groupe, je ne dis jamais une chose pour moi. Ça, c'est hors de question, je dis toujours les choses pour le bien du groupe.
Une causerie type ?
Je n’ai pas de causerie type. Dans la préparation, dans la présentation et dans le travail de la semaine, on reproduit souvent les mêmes choses. Je fais ça dans le but, justement, de créer des habitudes, pour que les joueurs se repèrent dans la semaine. Il faut qu'ils sentent quand le match arrive, que le niveau de concentration, le niveau d’investissement doit monter et que leurs repères deviennent très précis. Mais au niveau de la causerie, rien n’est pareil. Je refuse de faire deux fois la même. Je ne vais, peut-être, pas durer à cause de ça. C’est ce qui me prend le plus d’énergie : je me renouvelle constamment. C'est dur parce qu'on a un travail très répétitif et dans le même temps, on doit toujours surprendre. Du coup, on n’arrête jamais de réfléchir. Je veux que le groupe vive, que ce soit toujours nouveau pour eux. Comme si chaque match était leur premier match, avec de nouvelles choses qui leur permettent de se remettre dedans, et surtout, qu’ils sortent de leur quotidien et que ce ne soit jamais monotone.
La difficulté de lier principes de jeu et recherche du résultat ?
Je fais partie de ceux qui pensent que le jeu t'offre beaucoup de garanties. Après, tout est une question de confiance, surtout dans les moments compliqués. C'est pour ça que je veux faire ce que j'aime à ma manière, c'est le seul moyen pour que ton discours passe auprès des joueurs, ils doivent sentir la réalité, ils doivent ressentir les choses. La saison passée, la force de groupe, c’est ce moment de bascule quand les joueurs ont vu et se sont dit : « Ok, le coach ne change pas », même quand ça ne va pas, tellement il croit à ses idées. Lors d’un match à Angers, on se fait égaliser sur un ballon qu'on balance devant, alors qu'on avait été ultra dominant tout le match. Et c’est un truc qu’on n’avait jamais fait à l’entraînement. Je leur ai montré les images. Et je leur ai dit : « Quitte à se faire égaliser, au moins que ce soit sur nos idées de jeu ». Ce moment a été un point de bascule, les joueurs ont pu se rendre compte des choses. Ils n’ont plus jamais balancé le ballon. J’insiste dessus, la confiance de ton groupe est très importante, mais aussi la confiance que tu as sur tes idées de jeu. Je pense sincèrement que tu crées beaucoup plus de confiance par le jeu. Maintenant, tous nos matchs sont filmés, on revoit tous nos matchs, on a de la matière pour les joueurs. On peut leur montrer ce qu'ils ont fait de bien et leur dire que le résultat va venir naturellement, en corrigeant les détails. Revoir un match perdu où tu as bien joué, tu passes peu de temps à corriger en réalité. Par contre, un match gagné où tu as mal joué, tu prends beaucoup de temps pour tout corriger. C’est à ce moment-là que tu comprends que tu es sur un fil. C'est plus facile de basculer sur le fil positif quand tu crées du jeu, mais que tu n'as pas le résultat, parce que tu as beaucoup de choses à leur montrer et c'est très impactant, plutôt que quand tu gagnes sans bien jouer.
Deux écoles, celle du jeu et celle du résultat. Ton positionnement ?
Alors, j'ai malgré tout évolué, mais vraiment un peu. Quand tu joues à un jeu, il faut que tu sois conscient des règles. Je sais que je fais un métier où le résultat est très important. Le résultat fait que tu perdures ou non. Pour moi, le plus important, c'est que je sois heureux et que mon équipe soit heureuse. Donc ça passe par le jeu. J'ai besoin d'être content, j'ai besoin d'aimer ce que je vois. Je préfère rentrer chez moi et me faire virer en ayant essayé de jouer et d'y avoir cru jusqu'au bout. J'accepte les règles du jeu, il n'y a pas de problème. Je ne veux pas tout miser sur quelque chose où je n'ai pas de garantie.
La difficulté de jouer le maintien ?
C'est épuisant parce que tu peux… (il coupe). Il ne faut pas se leurrer. Tu fais quand même pas mal de compromis sur tes idées de jeu, sur tes idées tactiques. C'était beaucoup plus facile à mettre en place à Nice. Au niveau du jeu à pratiquer, sur le jeu de position, sur toutes ces choses, sur la déformation, les systèmes hybrides. Ici, au niveau du système hybride, c’est difficile. Changer d'un match à un autre, on peut le faire. Changer dans le même match, je sais que mes joueurs n'aiment pas. C'est à moi de m'adapter. Je sais que ça fait trop de consignes. Et ça, c’est quelque chose qui était très facile à Nice. Mais quand tu y arrives au Havre, ça a plus de saveur. À Nice, je mettais les joueurs en place et je ne regardais quasiment pas l’adversaire. Ici, tu prends vraiment tout en considération, tu dois être impactant. C'est fatigant mais quand tu y arrives, c’est plaisant.
La part de chance dans un match ?
Je ne crois pas trop à la chance, plus au destin. Parfois, tu rates et c’est comme ça. Pour revenir à la chance… Quand on prend le volume de travail, dire qu'à la fin : « Il s’est passé cet événement dans le match et c’était de la chance », non, je ne suis pas d’accord. J’ai beaucoup de mal avec ça. On peut dire : « On a manqué de réussite », mais manquer de chance, non. Quand tu prends en considération la chance, ça veut dire qu’en tant que coach, tu n’as pas bien cadré certaines choses. Le mec qui rate une action toute faite, ce n’est pas un manque, c'est un manque de réussite. Quoi qu'il arrive, tout ce qui se passe, c'est quelque chose que tu peux contrôler par ton travail au quotidien. Quand je dis « tu », j’inclus le joueur. S'il rate l’immanquable, c'est qu'il doit encore progresser sur certaines choses. Par exemple, le carton rouge, il est causé par une faute qui ne doit pas avoir lieu ou sur une mauvaise gestion des émotions. Ce n’est pas de la chance du coup. Quoi qu'il arrive, c'est un événement que tu aurais pu contrôler. À Lyon, la saison dernière, c’est le seul match où je peux dire : « On n’a pas eu de chance », parce que l’arbitre n’a pas été appelé par la VAR pour une faute flagrante au début d’une action qui a amené un but de Lyon. C'est le seul événement où je peux me dire « On n’a pas eu de chance ». Le reste, c’est des événements que joueur ou entraîneur, on doit mieux maîtriser, mieux appréhender. Ce match à Lyon nous a aussi été bénéfique. Dans sa globalité, la deuxième partie de saison a été bonne. Les joueurs ont connu un gros changement avec la différence de personnalité et d'approche entre leur ancien coach et moi. Moi aussi, j’ai connu un gros changement en passant de Nice au Havre. Donc forcément, ça faisait beaucoup de changements. Sur la deuxième partie de saison, le groupe a connu de nombreuses victoires et pris de nombreux points. Mais pour aller encore plus loin, ma grande satisfaction, c’est notre progression dans le jeu et d'un point de vue tactique. On a fait des matchs où tactiquement, tout a été respecté du début à la fin, les adversaires n'ont pas réussi à nous faire déjouer. Donc ça, c'est une vraie victoire.
L’impact de l’entraîneur sur le mercato
Il y a un projet avec des profils au poste qui sont définis, encore une fois, en fonction d'un projet de jeu idéal. Après, il y a une réalité, ce sont nos moyens financiers. On n'a pas des moyens financiers qui permettent d'avoir un projet de jeu idéal, j'ai envie de dire. On doit avoir un projet de jeu adaptatif. Et nous, c'est ce qu'on fait. Donc, pour un coach, ce qui est bien, c'est que ça te rend complet parce que tu ne peux pas t'enfermer dans le moindre modèle ou le moindre idéal. Tu opères en fonction de l'opportunité de marché et tu adaptes ton système ou pas. Du coup, je peux changer de système, mais jamais de conviction. On ne deviendra jamais une équipe qui va tout balancer devant. Je ne peux pas, c'est inconcevable. Par contre, je peux être amené à changer de système. Mais c'est quelque chose qui ne m'inquiète pas. Ue fois que nous, on a tout défini, il y a ce que le club peut faire. On me soumet des joueurs et je valide. Parfois, ça doit aller tellement vite que j'ai très peu d'impact. Chez nous, la moindre occasion, il faut la saisir. Pour mes dirigeants, le mercato, c'est un peu comme nous sur le terrain. Il y a des occasions, il faut les mettre au fond parce qu'elles ne se reproduisent pas. Parfois, on n'a pas le temps de me demander mon accord ou mon avis, mais j'ai confiance en eux. Tout ce qu'ils font, ils le font pour moi, ils ont envie que ça marche. Et comme moi, quand je prends une décision, je le fais pour mes joueurs, je ne le fais pas pour moi. On travaille ensemble, donc je ne vois jamais de mauvaises choses à ce niveau. On a tous le même objectif, on veut la même chose. On a juste des fonctions différentes. Non, je ne visionne pas les matchs pour recruter des joueurs. Je regarde tous les les matchs possibles et imaginables. Mais je le fais toujours comme un passionné. Je ne le fais jamais dans le but de me dire : « Peut-être que je vais trouver un joueur intéressant ». Après, quand on m'envoie une liste de joueurs ou quand on me demande mon avis sur un joueur, je peux regarder le joueur avec un oeil différent. Sinon, j’arrive à regarder les matchs avec mon oeil de gosse. C'est ce qui fait que je les regarde tous. Mais parfois, je regarde le match de manière déconnectée. Et c’est ce qui me plaît.
Groupe restreint ou élargi ?
Le but, c'est d'être à 20 joueurs et deux gardiens sur chaque entraînement. Dans ma méthodologie, il y a beaucoup de travail tactique, sous forme de jeux. L’idéal, c’est d’avoir 4 joueurs du centre de formation dans les 20 joueurs. Ces 4 joueurs complètent ton noyau dur de 16 joueurs. Tu as ton 11 titulaire, tu peux avoir un ou deux blessés, tu sais que tu as cinq changements maximum. C'est largement suffisant et beaucoup plus facile à gérer. Quand les joueurs viennent, c’est important qu’ils connaissent leur rôle. C'est comme un staff. Il y a un coach et un coach adjoint. Sur le terrain, il y a un titulaire et un remplaçant. Ce n'est pas une question de compétences. Chacun a un rôle, chacun doit remplir ce rôle, chacun doit aimer ce rôle aussi. C'est juste pour que tout fonctionne bien et qu'il n'y ait pas de malaise. Mais ce qui arrive dans un staff arrive aussi sur le terrain. Parfois, l'adjoint remplace le coach. Et c'est comme ça. Le remplaçant peut devenir titulaire. À la base, je veux un groupe restreint où tout le monde peut être impliqué, tout le monde est tourné vers le même objectif et tout le monde connaît son rôle. Ensuite, il faut avoir ces jeunes du centre qui t’amènent du sang neuf, de l’envie, ils boostent ceux qui sont là. Voilà le groupe idéal pour moi. C'est plus facile de créer une identité quand tout le monde se sent impliqué. Quand tu as des groupes trop élargis, C'est très dur.
Le processus pour imposer sa patte
Si tu veux un laps de temps, je ne pourrais pas vraiment le dire. Chez nous, il y a eu beaucoup de changements, on avait un groupe très étoffé, faire passer les messages, c'était compliqué. Lors du travail tactique, on avait des remplaçants alors qu’on était déjà sur une opposition interne. À chaque fois, on avait des joueurs sur le côté, c’était difficile de concerner tout le monde et de maintenir le groupe. Dans ces conditions, tu es moins précis. Quand tu as un groupe réduit, tu diffuses plus vite tes messages, tu impliques rapidement le groupe concerné et c'est fluide. Plus qu'un temps idéal, il faut un effectif idéal pour réussir à rapidement imposer sa patte. Voilà ce qu'il faut prendre en considération. Surtout quand il y a un nouveau coach, si vous voulez lui faciliter le travail, faites-lui justement un effectif réduit.
Ses inspirations
J'ai eu la chance de le rencontrer et de passer plusieurs jours avec lui : Carlo Ancellotti. Avec lui, tu as l'alliage entre la personne et l’entraîneur. C’est un coach qui n’a jamais été critiqué par un de ses joueurs. Je ne sais pas s'il y en a deux comme lui. En plus, il a réussi à gagner des trophées. Après, il y a aussi les coachs que j'aime regarder jouer comme Guardiola. Lui, tu le regardes pour la manière de jouer de ses équipes. Mais par exemple, j'aime Stéphane Le Mignan, j’aime la manière dont il fait jouer ses équipes et dont il a fait jouer Metz la saison dernière. Je peux te citer encore plein de coachs. J’aime tellement le foot. Je n'ai pas une inspiration particulière parce que le but, c'est de réussir le plus de choses. J'ai autant d'admiration pour la manière dont Metz a joué durant les barrages et ce, malgré l’enjeu, que pour Carlo Ancelotti qui est parvenu à faire tacler Vinicius en demi-finale de Ligue des Champions contre City. L’entraîneur a tellement de choses à faire que tu ne peux pas t’arrêter à une seule inspiration. Guardiola a créé plein de choses passionnantes notamment au niveau des systèmes hybrides, de la déformation, sur le jeu de position et sur les transitions au Barça ! Peu de gens en parlent, mais les transitions étaient dingues, notamment sur les passages offensifs-défensifs. On peut aussi parler de Klopp à Liverpool, il parlait notamment de rock'n'roll. Si je veux réussir à m'adapter, être le plus complet possible, je dois tout regarder. C'est beaucoup plus facile quand c'est ta passion. Du coup, tu t'éclates à regarder tout le monde. Je ne le vois même pas comme un exercice. Je le fais parce que j'aime bien. Et ce qui est bien, c’est que mon entourage est passionné aussi, quand j'ai une une idée en plein milieu de la nuit, je sais que je peux échanger avec quelqu’un. Ça me plaît de regarder, de m’inspirer, et ensuite, de regarder mon tableau pour voir ce que je peux faire. C’est bien de voir certaines choses sur une équipe, mais est-ce que ton équipe peut le reproduire ? Est-ce que ça vaut le coup pour ton équipe ? Il y a plein de choses à prendre en compte. Concernant mon vécu, le coach le plus impactant que j'ai eu, en termes de messages et d'idées, je ne l'ai eu qu’une semaine au Betis, c’est Quique Setién. Dès le début, il nous a dit : « On va choisir comment on va prendre nos buts et perdre nos matchs ». On se disait : « C’est particulier ça, il nous raconte quoi ? ». Après il a ajouté : « C’est en jouant ! Mais c’est aussi comme ça qu’on va marquer des buts et gagner des matchs ». Par contre, on ne fera pas autre chose. Le but à la fin, c'est qu'au ratio, on soit dans le positif. Après, c’est toujours pareil. Une fois que les mecs connaissent les règles, ils sont OK et ils jouent. J'ai aimé sa manière de diffuser son message et de dire : « Quand je vais en conférence de presse, je veux que ce soit vrai, que ce soit de ma faute, et de dire oui, on a pris ce but parce qu'on a essayé de jouer, c’est moi qui leur ai demandé ça ». Donc tu vas et t'assumes tes responsabilités de coach. Ils disaient aux joueurs : « Si on prend un but en balançant le ballon, ce sera de la faute du joueur qui a balancé ». Et je le dirai haut et fort. Il m’a vraiment impacté. Après, j’ai eu de bons coachs, des bonnes personnes, je n’ai pas eu de souci. Je tiens à mettre en avant Quique Setién, pourtant, je ne l’ai pas connu longtemps.
La pression médiatique
Moi, j'ai une chance, je n'ai pas les réseaux sociaux. Ça ne m'intéresse pas. Je passe tellement d'heures au centre… Ce qui se dit sur moi, ça ne vient pas jusqu’à moi. La pression, je la gère très bien, je connais les règles du jeu et surtout, je n'ai pas de problème avec les règles du jeu. Mon seul stress de la semaine, c'est d'avoir donné tous les éléments possibles à mes joueurs. C'est juste ça. Je n'ai pas la pression du résultat. Je connais les règles du jeu et je n'ai vraiment pas de problème. Je fais les choses pour mes joueurs. À la fin, je veux qu’ils se disent : « Le coach nous avait tout donné ». Si on perd, je veux qu’on se dise : « L’adversaire a été juste meilleur ». Je veux tout optimiser pour avoir le meilleur résultat possible en jouant. Mon seul stress, c'est ça. C'est d’avoir, à chaque fois, donné le maximum pour mes joueurs. Mais ça, ça te prend beaucoup de temps. Parfois, tu vois une image, tu as une interprétation. Et puis, le lendemain, tu la revois et tu peux en avoir une autre. Et puis, tu peux tout préparer avec une équipe et finalement, un mec se blesse et tu dois tout refaire parce que son remplaçant n’a pas le même profil. Certains peuvent considérer une chose comme minime et moi non. Je veux donner toutes les munitions possibles à mes joueurs, et pour moi, ça prend beaucoup de temps.
La nouvelle génération réputée ingérable
Avant quand tu donnais une consigne à un joueur, il faisait. Maintenant, tu dois lui expliquer pour qu’il fasse. Ça, c'est une vérité. Mais en fait, c'est logique. On parle toujours des générations, mais est-ce qu'on prend le temps de les comprendre aussi ? Ou est-ce qu'on s'arrête à un jugement ? Les nouvelles générations, il faut leur expliquer. À mon époque, ce n’était pas comme ça. Mais nous, c'était dur d'avoir des réponses à des questions. Et le problème, c'est que tu as vieilli avec des interrogations. Eux, grâce aux évolutions, grâce à internet, toutes les questions qu'ils ont dans la tête, ils peuvent avoir la réponse dans la seconde. Donc, comment tu veux défaire leur manière de conceptualiser cette chose ? Si à chaque question qu'ils ont, ils prennent leur téléphone, ils la posent et ils ont une réponse. Et toi, tu es coach, quand le mec ne comprend pas pourquoi il doit faire ça, tu ne lui donnes pas de réponse. Ce n’est pas possible, ce n’est pas logique. Tu ne peux pas juste lui dire : « Fais et puis c'est tout ». Il faut lui expliquer. Et peut-être que tu vas l’emmener encore plus loin dans sa réflexion. C'est juste une génération différente. Si on était nés à la même époque, on serait exactement comme eux.Il ne faut pas croire qu'on serait différents. C’est une génération qu'on ne met pas en avant, du fait de l'évolution, mais cette génération travaille énormément. Ils ont plus d'outils. Cette génération, on peut l’amener très loin grâce au travail. Moi, ça ne me dérange pas de leur expliquer. C'est aussi pour ça que je veux toujours me renouveler. Cette génération est née avec les réseaux sociaux, ils sont habitués à voir de nouvelles choses toutes les cinq ou six secondes. Tu ne peux pas leur faire les mêmes entraînements ou les mêmes causeries tous les jours. Leur quotidien, c’est d’avoir de nouvelles choses qui défilent. Tu ne peux pas défaire l’homme du joueur. Si tu veux surprendre le joueur, tu dois surprendre l'homme. Ils sont habitués à ça. Nous aussi, on doit faire avec l'évolution du temps.
La nouvelle génération de coachs
Moi aussi, je fais partie de la nouvelle génération de coachs avec un fonctionnement d'ancienne génération (sourire). Je fais partie des gens qui pensent qu'il y a beaucoup de choses valables avant qui peuvent encore l'être maintenant, notamment sur le cadre de vie. Ça, je n'en sors pas. Sur le respect, sur la politesse, ce sont des choses où je ne bougerai pas d'un millimètre. Pour tout le reste, on fait partie d'une génération beaucoup plus ouverte, qui prend en considération le fait que le monde évolue et que parfois, c'est bien aussi (sourire).
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