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·11 septembre 2020

[Premier League] Arsenal, une révolution nommée Arteta

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Le 20 décembre 2019, Mikel Arteta est nommé à la tête d’Arsenal. Comme un symbole, son arrivée survient après une défaite cuisante des Gunners subie face à son ancien employeur : Manchester City. Arsenal est alors au fond du gouffre et pointe à une peu reluisante 9e place. L’Espagnol connait l’ampleur de la tâche, et va amorcer un plan efficace pour remettre le club sur orbite. Décryptage du plan orchestré par Arteta pour relancer les Gunners.

Le choix du club et des supporters

Au moment de son arrivée, le constat est implacable. Arsenal est neuvième, distancé dans la course au big four incapable de maitriser une seule rencontre. Les Londoniens remportent un seul de leurs 10 derniers matches de championnat. Monument du football anglais, Arsenal subit les événements et s’enlise quelque peu dans une crise à tous les étages. L’équipe et certains cadres, à l’instar de Granit Xhaka, connaissent des heures difficiles, et le courant ne semble plus passer avec une partie des fans.


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Pour faire face à cette période mouvementée, tous les regards se tournent naturellement vers Mikel Arteta. Des retrouvailles manquées en juin 2018, où la direction lui préféra Unai Emery. L’ancien métronome des Gunners arrive dans un climat délétère et se sait attendu pour faire renaître de ses cendres un mythe du football européen, en quête éperdument d’un second souffle.

Fédérer un groupe et créer une identité

Lors de sa prise de fonction, Mikel Arteta préconise avant tout l’idée de restaurer une alchimie dans le groupe, de redonner confiance à des joueurs qui courent désespérément derrière les victoires. Il faut donc revitaliser le moral des troupes, les faire adhérer à ses principes et à sa philosophie et rassembler les joueurs autour d’une cause commune, pour ensuite se consacrer pleinement à la dimension sportive : «J’espère que nous pourrons changer ce climat négatif. Je dois d’abord convaincre les joueurs et, si je parviens à le faire, nous pourrons ensuite convaincre ensemble les fans. Je pense que c’est très, très important dans mon travail. Quand je suis arrivé, je n’avais qu’une seule mission : faire en sorte que les joueurs et le staff soient persuadés que nous pouvions y arriver. Nous devions changer cette énergie et cette mentalité.»

Redonner de la confiance aux joueurs

Un des exemples qui illustre parfaitement le début de la révolution mise en place par Arteta se nomme Granit Xhaka. Le joueur suisse fait la pluie et le beau temps depuis son arrivée en 2016. Bien que chahuté par une partie des supporters, il s’est constamment imposé dans le onze de départ, que cela soit avec Wenger ou Emery. Après un début de saison poussif individuellement et désastreux collectivement, la relation entre Granit et les fans semblait au point mort après une rencontre animée face à Crystal Palace.

Dévasté par le manque de considération et les propos injurieux des fans, Xhaka exprime toute sa frustration en jetant son brassard de capitaine. Privé de compétition durant plusieurs semaines, il est progressivement réintégré dans l’équipe mais Arsenal n’y arrive toujours pas. Dans un tel contexte, Granit souhaite quitter un navire en totale perdition. Les rumeurs l’envoient avec insistance vers le Hertha Berlin. Une possibilité immédiatement balayée par Arteta, qui voit en Xhaka un joueur fondamental de son équipe : «Je lui ai dit à quel point je l’aimais et ce que j’attendais de lui. Je suis là pour l’aider, je veux qu’il ait le sentiment que nous sommes derrière lui. Pas seulement moi, mais tout le club. Si nous pouvons aussi amener les supporters à pleinement le soutenir, je pense que ce sera utile pour l’équipe.» Celui qui le suivait déjà à City compte sur le Suisse. Finalement Granit est convaincu et reste dans le nord de Londres. Une décision pleine de sens.

La jeunesse au pouvoir

La reconstruction d’un club et la volonté d’élaborer quelque chose de concret concerne irrémédiablement les jeunes pousses. Une donnée parfaitement enregistrée par Arteta, qui ne rechigne pas à aligner notamment les babys Gunners issus du centre de formation.

Arsenal a la chance de disposer de plusieurs jeunes extrêmement talentueux, à l’instar des Saka, Martinelli, Nelson pour ne citer qu’eux. Pour autant, Mikel Arteta sait se montrer intransigeant indépendamment du statut et de l’âge des joueurs. Mattéo Guendouzi, auteur de plusieurs écarts de conduite, a été écarté en fin de saison. Une prise de position claire, qui démontre toute l’importance de respecter le groupe, aux yeux du coach. l’ancien lorientais est sur la liste des transferts.

Un projet qui nécessite du temps

Un tel projet est basé sur le long-terme et la patience est de mise. Les débuts d’Arteta sont encourageants, en atteste la première période de haute volée effectuée par ses troupes contre Chelsea fin décembre ( défaite 1-2). Pour autant, le manque de fraîcheur physique, et les carences individuelles, ralentissent inéluctablement l’équipe dans sa quête de parfaire son retard en championnat. Arsenal connait des hauts et des bas, en témoigne l’élimination prématurée en 16es de finale de Ligue Europa face aux Grecs de l’Olympiakos (0-1, 1-2) et une période d’invincibilité entre le 29 décembre et le 17 juin qui prend fin en Premier League.

Malgré une progression collective, Arsenal finit à la 8e place. Le bilan du tacticien espagnol demeure relativement bon avec 33 points pris en 20 matches (contre 23 récoltés en 18 avant son arrivée). Les railleries incessantes concernant l’arrière-garde londonienne semblent de moins en moins au goût du jour puisque, sous sa houlette, les Gunners encaissent 21 buts en 20 matches contre 27 en 18 rencontres avant son intronisation. Mieux encore, si la saison avait débuté après sa prise de fonctions, Arsenal ne serait qu’à un seul petit point des places qualificatives pour la Ligue des champions. Ils étaient à 9 points lors de la 18ème journée. Un bilan comptable encourageant sans pour autant transcender les foules, terni par quelques rencontres ô combien frustrantes. Mais la FA Cup va mettre en lumière tout le travail effectué depuis plusieurs semaines.

Sheffield et la mise en place du 3-4-3

Connu pour ses largesses défensives, Arsenal était déjà sur la bonne voie. Face à Sheffield, en quart de finale de la Coupe d’Angleterre, Arteta met en place un 3-4-3. Un système loin d’être anodin. Dans une rencontre insipide, Arsenal l’emporte 1-2 grâce à un but dans les ultimes instants de Dani Ceballos, complètement revitalisé depuis le restart.

Dans ce 3-4-3, il est repositionné dans un double pivot avec Xhaka et peut exprimer toute l’étendue de son talent. Généreux dans l’effort, et soyeux avec la balle, Dani est devenu un élément incontournable de l’équipe, après des premiers mois en demi-teinte. Une qualification obtenue dans la douleur, qui laisse présager une fin de saison plus radieuse.

Une animation collective cohérente, et un esprit de vainqueur

Au-delà du changement de système, Arsenal va mettre en exergue tout le travail de l’ombre effectué par Mikel Arteta et son staff lors de ces trois rencontres.

D’un point de vue purement tactique, Arsenal dégage un style clairement identifiable. Dans un premier temps, la patte Arteta se caractérise par la propreté et la beauté des sorties de balles. Le but est simple mais ô combien efficace. Elles consistent à attendre au maximum que les joueurs adverses pressent, afin de créer de l’espace notamment pour les pistons. Ce qui était un point faible sous Emery, se transforme en une véritable marque de fabrique chez Arteta. Très sereins avec la balle, les Gunners sont patients et attendent le bon moment pour rechercher les pistons qui collent la ligne, à savoir Bellerin et Maitland-Niles. L’utilisation de la largeur est entièrement respectée afin de créer également de l’espace dans l’axe pour Ceballos, Xhaka, et David Luiz qui rayonne dans ce schéma. Par la suite, les pistons cherchent en priorité à toucher les joueurs devant eux, à savoir Pépé, Saka ou Aubameyang. Vint ensuite le moment de renverser de l’autre côté afin de trouver le joueur offensif libre, et face au jeu. Un décalage propice pour tirer (Aubameyang face à Liverpool notamment) ou centrer.

Le plan est extrêmement bien ficelé et permet aux Gunners de se procurer de réelles occasions.

On retrouve également cette recherche quasi systématique de la verticalité avec les pistons qui n’hésitent pas à envoyer les ballons en profondeur entre les latéraux et les centraux adverses pour trouver les flèches de l’attaque comme Pépé ou Aubameyang (penalty contre Chelsea et but contre City).

Énième trouvaille du chef Arteta : Tierney positionné en tant que central gauche dans la défense à trois. Il n’hésite pas à dédoubler sur l’aile gauche lors des attaques directes. Dans ce cas de figure, Maitland-Niles participe également à l’attaque en resserrant dans l’axe tout comme Aubameyang. Les Gunners attaquent et défendent en nombre et cela représente à merveille la volonté de bâtir un groupe d’amis qui font les efforts les uns pour les autres.

Arsenal alterne entre des phases de pressing assez intenses que l’on retrouve surtout lors des quarante-cinq premières minutes. Un pressing bien organisé, très haut, qui leur permet également de rester dans la même philosophie à savoir récupérer le ballon et attaquer le plus rapidement possible les espaces libres (par exemple, les occasions face à City). Les pistons pressent très haut les latéraux adverses afin de contraindre l’équipe à revenir sur leur gardien. Un schéma en 3-4-3 modulable, qui permet également à Lacazette de décrocher, afin de libérer de l’espace dans l’axe pour les feu follets Pépé et Aubameyang. Nketiah, qui est davantage un joueur de profondeur, joue plus haut.

Cette animation collective utilise donc principalement les transitions rapides, et la recherche de la verticalité. Elle permet également de solidifier la défense. En témoigne les deux buts encaissés en trois matches face à des cadors de Premier League. Les pistons jouent un rôle prépondérant, aussi bien défensivement qu’offensivement. La gestion des espaces offensifs et des déplacements sont également importants, et extrêmement bien enregistrés par Aubameyang qui trouvent de manière permanente des espaces à exploiter.

Ces améliorations tactiques ont grandement contribué à dominer City, Chelsea puis Liverpool, et donc remporter la FA Cup et le Community Shield. Pour autant, derrière des idées tactiques bien trouvées, repose une prise de confiance et une mentalité de vainqueur retrouvées dans ce groupe.

«J’ai vu mes joueurs évoluer ensemble, profiter de leur métier, passer du temps entre eux. C’est ce qui me rend le plus fier, les trophées ne sont que la conséquence logique de cet état d’esprit.»

Défaillants dans les grandes rencontres depuis plusieurs années, Arsenal entame désormais les matches dans l’idée de gagner et de faire mal à ces équipes-là. Une impression partagée par son ancien mentor qui en a subi les frais : «Il n’y avait pas de meilleure personne que Mikel pour faire le travail. J’ai le sentiment qu’il est en train de créer quelque chose d’unique. S’il peut être soutenu par le club avec des investissements, qu’il a les joueurs dont il a besoin, ils pourront être des prétendants au titre pour les prochaines années. Je vois de l’extérieur la manière dont ils célèbrent leurs buts, comment ils se battent pour chaque ballon, a dit Guardiola. Ils commencent à créer quelque chose de spécial pour le club.»

Des propos symboliques qui en disent long sur l’apport aussi bien tactique que mental de Mikel Arteta.

Une attractivité grandissante

Arsenal reste une place historique dans l’imaginaire mondial, mais son attractivité semble se réduire d’années en années, surtout en l’absence de qualification en Ligue des champions. Mikel Arteta représente un facteur d’attractivité non-négligeable et ses premières prouesses ont fait du bruit sur le Vieux continent. Il a notamment joué un rôle considérable dans l’arrivée de Gabriel et pourrait convaincre Aubameyang de prolonger l’aventure dans le nord de Londres.

Battre successivement Liverpool, City, Chelsea et de nouveau les Reds donne une sacrée reconnaissance au projet de l’ancien capitaine des Toffees. Ce qui peut permettre d’attirer des joueurs de choix, à l’instar de Houssem Aouar ou encore Thomas Partey, priorité du club. Des arrivées qui pourraient permettre de modifier le système en un 4-3-3 et ainsi proposer une animation plus dominatrice et plus dangereuse face aux blocs bas. (35% possession de moyenne face à City, Chelsea et Liverpool). Arsenal a excellé sur transition rapide face à des équipes qui jouent relativement très haut. Il faudra observer comment l’équipe se comporte face à des blocs bas et resserrés.

Contrairement aux idées reçues, Arsenal est muni d’un back four ou back five de très bonne qualité qui n’a rien à envier au reste des équipes du royaume, si ce n’est Manchester City ou Liverpool. Martinez, David Luiz, Tierney ou Maitland-Niles ont crevé l’écran sur les derniers matches. Bellerin retrouve peu à peu des sensations, tandis que Saliba et Gabriel viennent de poser leurs valises. L’heure est à l’optimisme, dans un secteur qui a essuyé pléthore de critiques depuis tant d’années.

En l’espace de quelques mois, Mikel Arteta a remis Arsenal sur de très bons rails. Très méticuleux, il a su insuffler une nouvelle dynamique à tous les niveaux. Il a su rendre crédible le projet sportif d’un club, en faisant adhérer l’équipe à ses idées et en donnant confiance à l’ensemble du groupe, tout en améliorant drastiquement les principes tactiques d’Arsenal.

33 ans plus tard, Mikel Arteta marche peut-être sur les traces d’un certain George Graham. Un premier titre pour sa première saison au poste, des jeunes au pouvoir, et l’envie de revoir Arsenal au sommet du royaume.

Crédits photo : PA Images / Icon Sport.

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