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Le Corner
·15 febbraio 2025
Eloge d’une équipe iconique : le Bolton de Sam Allardyce
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·15 febbraio 2025
Au début des années 2000, Bolton, modeste club de la banlieue mancunienne, parvient à se faire un nom dans le Royaume grâce à un homme : Sam Allardyce. Entraîneur charismatique et visionnaire, « Big Sam » fait de Bolton une machine à gagner qui rivalise avec les plus grands clubs anglais, malgré des moyens limités. Il façonne ainsi, en quelques saisons, l’une des équipes les plus emblématiques de l’histoire de la Premier League.
« En 2010 avec Blackburn, on fait l’échauffement avant un match contre Manchester United. Pendant la causerie, Sam Allardyce nous montre des images des films Gladiator et 300 pour nous motiver et faire de nous des guerriers sur le terrain. Après 30 minutes, nous étions menés 3-0. Finalement, on a perdu 7-1 ». Cette savoureuse anecdote, livrée par l’ancien monégasque Gaël Givet, définit à elle seule la méthode si particulière d’Allardyce. Un management atypique dont il fait d’ailleurs encore les frais sur la toile. Les fans anglais, charrieurs, ne manquent en effet jamais une occasion de se moquer de Big Sam. Pour beaucoup, il incarne le pompier de service un peu ringard, pratiquant un football d’un autre temps. C’est en tout cas l’image laissée par Allardyce, après ces passages infructueux du côté de Crystal Palace, d’Everton, de West Bromwich ou encore de Leeds.
Cependant, c’est bien vite oublié que Big Sam fût l’un des manageurs les plus novateurs de sa génération. Un bourreau de travail ayant su faire déjouer les plus grands clubs anglais pendant près d’une décennie. Un entraîneur capable de réaliser des miracles, malgré les faibles moyens mis à sa disposition. Un visionnaire dans le domaine de la data, du management et du recrutement. Un génie incompris, probablement trop en avance sur son temps, dont l’œuvre commence seulement aujourd’hui à être réhabilitée et appréciée. Près de vingt ans après son départ du club, de nombreux fans évoquent, avec nostalgie, les prouesses de cette équipe légendaire.
Tuniques blanches, quelques détails rouge et bleu rappelant les autres couleurs du club, mais surtout l’iconique sponsor Reebok au centre du maillot. Des tenues d’une simplicité et d’une élégance rares, devenues aujourd’hui mythiques. Un partenariat logique, rappelant le lien qui unit l’entreprise britannique et la ville du Lancashire. Bolton, ville historiquement liée à l’industrie textile, devient, durant la Révolution industrielle, l’un des premiers centres textile au monde. Cette effervescence permet à Joseph William Foster de fonder sa société de chaussure en 1895. La marque, renommée Reebok par les petits-fils de Foster, devient une firme internationale à partir des années 1980.
Une collaboration, qui sonne donc comme un retour aux sources pour la marque. Durant deux décennies, l’équipementier anglais et les Wanderers vont entretenir un partenariat fructueux, allant de la fabrication des équipements et du sponsoring des maillots jusqu’au nom du nouveau stade de Bolton, le Reebok Stadium, inauguré en 1997. Une association rendant les supporters des Trotters nostalgiques. En effet, beaucoup d’entre eux nomment encore leur stade Reebok Stadium, malgré la fin de l’accord avec la marque en 2014. Enfin, pour les fans de football, le lien entre Bolton et Reebok symbolise également de l’âge d’or de la Premier League, considéré par beaucoup comme correspondant aux années 2000.
Le Reebok Stadium : une enceinte mythique pour une équipe mythique.
Bien avant la veste de costume et la cravate, Big Sam a écumé les pelouses boueuses de Football League pendant près de deux décennies. Robuste défenseur central, il est repéré dès l’âge de quinze ans par Bolton, qui lui donne sa chance. Il défend les couleurs des Trotters durant neuf saisons et prend part à l’ascension de Bolton de la troisième division à la First Division. En 1983, il s’engage à Tampa Bay. Son bref passage aux Etats-Unis va néanmoins indubitablement influencer sa manière de percevoir le football. Contraint de s’entraîner dans le même centre d’entraînement que l’équipe de NFL des Buccaneers, le futur technicien va être impressionné par l’approche tactique de cet autre sport. L’utilisation de la technologie ainsi que le soin apporté à chaque détail vont ainsi façonner sa vision du football.
Devenu entraîneur après avoir raccroché les crampons, Big Sam va être contacté par Bolton en 1999 afin de prendre les rênes de l’équipe. Profondément attaché à son ancien club, il accepte sans hésiter. Durant huit ans, il travaille sans relâche pour son club de cœur. Son seul objectif étant de le mener vers les sommets. Ces nombreuses années, passées dans le Lancashire, le font tomber amoureux de Bolton, qu’il considère comme sa ville adoptive. Néanmoins, son passage sur le banc des Trotters est davantage marqué par sa conception extrêmement pragmatique et révolutionnaire du football influencée par son exode américain. En effet, Allardyce va tenter d’imposer ses idéaux à une époque où le romantisme et les artistes sont encore sur le devant de la scène.
Dès sa prise de fonction à Bolton, Allardyce va mettre en pratique sa vision du football. Croyant déjà en la data, le technicien anglais utilise Prozone, un logiciel d’analyse de données permettant de l’aider à réaliser ses objectifs. Une exploitation des statistiques qui lui permet de rationaliser un match de football. Grâce aux statistiques, Big Sam savait qu’en ouvrant le score son équipe avait de fortes chances de l’emporter et que les corners rentrants étaient bien plus efficaces que les corners sortants. Enfin, ce système permet surtout au manager anglais de tirer le meilleur de son équipe, notamment sur phase de jeu arrêté. Allardyce insiste d’ailleurs principalement sur le placement de ses joueurs lors de chaque séquence. Une hérésie pour les amoureux du beau jeu, mais une formule d’une efficacité diabolique.
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Très vite, cette science va être décriée par les puristes. Des critiques vont émaner de toutes parts, évoquant l’absence de jeu, ainsi que la robotisation des joueurs. Les médias et les fans font d’Allardyce le dernier apôtre d’un kick’n rush désormais obsolète. Un simple ersatz des grands Bob Paisley ou Graham Taylor. Cependant, percevoir Big Sam comme un dinosaure est une grossière erreur. Il s’agit au contraire d’un précurseur et d’un génie incompris. En effet, cette saison, les commentateurs font l’éloge d’Arsenal, devenu maître incontesté des coups de pied arrêtés. On parle alors d’art, de science ou de génie. Malheureusement, le Bolton d’Allardyce n’a pas bénéficié du même traitement médiatique il y a vingt ans, étant souvent raillé pour son inesthétique.
L’avènement de la Premier League, au début des années 1990, a considérablement bouleversé la gestion des clubs. Les droits télévisuels, notamment, permettent aux clubs de l’élite d’améliorer considérablement leurs finances. Un apport économique majeur permettant souvent aux promus de claquer des sommes astronomiques lors du mercato, généralement sur de bons gros flops. Cependant, Bolton, promu en Premier League en 2001, va opter pour une autre stratégie. Allardyce le sait, son club dispose de moyens faméliques comparativement aux autres clubs. Il décide donc de limiter drastiquement ses dépenses en transferts et recrute un maximum de joueurs libres de tout contrat. Une politique de recrutement à l’ancienne permettant d’obtenir une masse salariale plus conséquente. Grâce à ce choix audacieux, Big Sam va attirer de nombreuses stars dans le Lancashire.
Bolton va en effet secouer le Royaume en s’attachant les services de grands noms du football. Au fil des saisons, la politique de recrutement mise en place par Allardyce se fait plus ambitieuse. Le technicien s’offre notamment Jay-Jay Okocha. Un joueur « si bon qu’ils l’ont nommé deux fois », comme le chantaient les supporters des Trotters. Très vite, l’Angleterre va tomber sous le charme du Nigérian. Grâce à sa technique et ses dribbles chaloupés, Okocha apporte la touche de folie manquante à l’équipe d’Allardyce. Mais Big Sam ne s’arrête pas là. Il parvient à convaincre les deux anciens Madrilènes Ivan Campo et Fernando Hierro de rejoindre la banlieue de Manchester. Au cours de son mandat, le technicien anglais s’attache également les services de Bobic, Speed, Nakata, Hamann ou encore El Hadji Diouf. Certains ne parviendront pas à performer, d’autres deviendront de véritables légendes du club.
Au début des années 2000, les Français sont à la mode. Le monde entier bouge sur l’album Discovery de Daft Punk, Le Fabuleux Destin d’Amélie Poulain cartonne dans les cinémas du monde entier et les Frenchies envahissent les pelouses de sa Majesté. On pense instinctivement aux stars françaises d’Arsenal, surtout à Pascal Cygan… évidemment. Bolton va également succomber au charme du made in France. Certains joueurs de l’Hexagone vont même bâtir les fondations du projet d’Allardyce. Les premiers gros coups de Big Sam se font d’ailleurs dès la promotion du club en Premier League. En délicatesse du côté de l’OM, N’Gotty rejoint les rangs de Bolton. L’impact est immédiat, tant l’expérience du haut niveau de N’Gotty va être cruciale. Le Français deviendra d’ailleurs le taulier de la défense des Trotters durant cinq saisons. Cependant, la véritable attraction est l’arrivée du champion du monde 1998, Youri Djorkaeff.
Youri ! Youri ! Lui, quelle est sa force ? C’est les trente derniers mètres !
Brouillé avec son entraîneur Andréas Brehme, le Français rejoint contre toute attente le Lancashire. Djorkaeff régale la Premier League par sa classe et sa vista. Il devient ainsi le leader d’attaque de la formation d’Allardyce. Cette French Touch apporte le surplus d’expérience et de talent nécessaires à Bolton. Le succès de ces transferts pousse rapidement Big Sam à acheter français. Bernard Mendy et Pierre-Yves André gagnent la banlieue mancunienne la saison suivante, Florent Laville et Ibrahim Ba les imitent ensuite lors de la saison 2003-2004. Vincent Candela et Martin Djetou font également leurs valises dans le nord de l’Angleterre, suivis d’Abdoulaye Meïte, mais surtout de Nicolas Anelka. L’ancien prodige, voyant sa carrière tourner au ralenti depuis quelques saisons, va être approché par Allardyce. Sous les ordres de Big Sam, Anelka se relance et attire de nouveaux les plus grands clubs grâce à ses performances.
La grande force d’Allardyce, au-delà de ses statistiques et de ses data, réside dans le génie de son management. Durant son mandat, il parvient à forger un véritable groupe et surtout à diriger une équipe très hétérogène. En effet, cohabitent au sein du vestiaire des Trotters des champions du monde, des vainqueurs de la Ligue des Champions, des génies et des légendes du football, mais également des joueurs lambdas, voire des parias à qui l’on ne donne plus la moindre chance. Grâce à sa forte personnalité, Big Sam gère les égos et reste très proche de chacun de ses joueurs, créant ainsi une osmose dans son vestiaire. Un style de management très moderne et qui fait actuellement le succès d’Ancelotti au Real ou d’Arteta à Arsenal. Campo qualifie même Allardyce de « père adoptif », exemple du profond respect que lui portent ses joueurs.
Ce relationnel va même être la base de la réussite du projet. En effet, si autant de grands noms ont bravé la pluie et le froid du Lancashire, c’est grâce aux mots d’Allardyce. L’Anglais prend systématiquement l’avion pour rencontrer personnellement ses futures recrues. Ce souci du détail et du bien-être, permet à Big Sam de mettre la main sur des joueurs attachés au club. Il évite ainsi de s’attacher les services de mercenaires en quête de juteux contrats. Cette proximité relance certains joueurs en manque de confiance à l’instar d’Anelka, mais surtout d’El Hadji Diouf. Le Sénégalais, persona non grata du côté de Liverpool, va s’épanouir sous la houlette d’Allardyce durant trois saisons. Comme lui, de nombreux anciens Trotters se souviennent avec nostalgie de leur passage dans le Lancashire et du privilège d’avoir évolué sous les ordres d’Allardyce.
Après deux saisons passées à éviter la relégation, Bolton truste ensuite la première partie de tableau durant quatre saisons consécutives. Les Trotters deviennent des outsiders ultra-compétitifs et s’offrent chaque saison le scalp des meilleures équipes du Royaume, devenant même la bête noire d’Arsenal. « Je pense que si vous aviez demandé à des équipes comme Arsenal et Manchester United quelle équipe ils aimaient le moins jouer, cela aurait été nous. Nous étions très bien préparés. » déclarait même le champion d’Europe 2004 Giannakopoulos. En dépit des bons résultats, Bolton se heurte à un plafond de verre et ne parvient jamais à se qualifier pour la Ligue des Champions. Cependant, le club du Lancashire fait ses premiers pas sur la scène européenne en se qualifiant en Coupe UEFA. Les Wanderers se hissent en 16eme de finale, mais sont éliminés par l’Olympique de Marseille en raison d’une défaite au Vélodrome.
L’apogée du mandat d’Allardyce intervient au cours de la saison 2004-2005. Le dernier trophée majeur du club remontant à 1958, une coupe pourrait être un excellent moyen de faire rêver les fans et d’installer un peu plus le club parmi les grands du Royaume. C’est en League Cup que les protégés de Big Sam vont performer. Après avoir écarté les clubs de Walsall et Gillingham, les Trotters affrontent Liverpool à Anfield. Au terme d’une rencontre haletante, Bolton se qualifie grâce à un penalty de Djorkaeff à la dernière minute. Le club de la banlieue mancunienne vient ensuite à bout de Southampton et se qualifie pour les demi-finales.
A domicile pour la rencontre aller, les hommes d’Allardyce vont livrer une performance qui restera à jamais dans le cœur des fans. Grâce à deux bangers d’Okocha, un Djorkaeff de gala, un Giannakopoulos en mode papinade et un N’Gotty surpuissant, Bolton explose Aston Villa cinq buts à deux. Malgré une défaite deux à zéro lors du match retour, les Trotters se qualifient pour la finale de la compétition. A Wembley, ils font face à leur Némésis : Middlesbrough. Les deux équipes partagent en effet des caractéristiques semblables et possèdent une trajectoire similaire. Cette finale s’annonce donc comme un choc entre deux parvenus. Malheureusement, Big Sam et ses hommes passent à côté de leur finale et s’inclinent deux buts à un. Cette équipe, bien qu’iconique, ne remportera finalement rien.
Adulé autant que détesté, le Bolton de Big Sam reste l’une des équipes les plus emblématiques de l’ère Barclays. Malgré son modeste budget, le génie d’Allardyce a permis au club de défier les pronostics et de marquer la Premier League de son empreinte. Annoncé il y a quelques semaines comme favori à la succession de Ian Evatt, licencié par Bolton, les nostalgiques ont alors nourri le projet chimérique d’un improbable retour de Big Sam. Un doux rêve qui ne deviendra pas réalité, le board ayant opté pour un autre candidat.
Sources :
– Blair Newman, « Remembering Sam Allardyce’s brilliant and brutal Bolton of Okocha, Djorkaeff, Hierro and Campo », These Football Times
– Ryan Dabbs, « Big Sam gets a bad rap as a bit of a dinosaur, but that couldn’t be further from the truth. He was ahead of the curve on many things – I loved playing for him’: Ex-Bolton star sets record straight on Allardyce », FourFourTwo