Peuple-Vert.fr
·29 de maio de 2025
Ligue 1 : "La data, c'est devenu le père noel des clubs français"

In partnership with
Yahoo sportsPeuple-Vert.fr
·29 de maio de 2025
Sur RMC dans l'émission l'After foot, Jennifer Mendelewitsch, agent de joueurs, dresse un constat préoccupant du mercato français à venir (ligue 1 et ligue 2). Entre incertitudes économiques, perte d’attractivité et vision court-termiste, elle tire la sonnette d’alarme. Extraits.
"Très inquiète, oui. Ce n’est pas du tout comparable avec ce qu’on observe chez nos voisins. En France, les clubs sont dans un état psychologique sinistre. Tous — et c’est la même chose pour mes confrères — nous disent la même chose : "On attend le passage devant la DNCG". Il y a une peur généralisée. Les clubs n'ont aucune visibilité sur leurs droits TV, donc ils n’avancent sur aucun dossier. Avant de recruter, ils doivent vendre. C’est un marché complètement bloqué."
Les offres salariales sont extrêmement basses. Là où la France avait autrefois une vraie supériorité salariale par rapport à des championnats comme les Pays-Bas ou le Portugal, aujourd’hui, ces pays peuvent proposer des contrats aussi intéressants — voire meilleurs — que certains clubs français. C’est très inquiétant.
Est-ce seulement une question d'argent ?
"Non, c’est aussi un problème de vision. Tous les présidents nous parlent d’économies et, forcément, de "data". La data est devenue le Père Noël du foot français. Mais il faudrait rappeler que la data est un outil, pas une solution magique. Elle doit être interprétée par des humains. Si tout le monde utilise les mêmes logiciels pour sortir les mêmes profils, sans avoir les moyens financiers pour recruter ces joueurs, ça n’a aucun intérêt."
"Des cellules de recrutement gravement impactées. On les réduit à peau de chagrin au lieu d’investir dedans. C’est exactement l’inverse de ce qu’il faudrait faire. On devrait renforcer nos cellules de recrutement, former des analystes capables de croiser data et expertise terrain. C’est ainsi qu’on fait des recrutements intelligents. Aujourd’hui, on est à court de moyens, mais surtout, on est à court d’idées."
Est-ce que les clubs étrangers en profitent ?
"Évidemment. En tant qu’agents français, on reçoit des mandats de clubs étrangers pour négocier avec des clubs français, précisément parce qu’ils savent qu’on est en difficulté. Un joueur pour lequel on pouvait négocier 20 à 30 millions il y a peu, on reçoit maintenant des offres à moins de la moitié. Le monde sait que le foot français est affaibli, et il en profite."
"C’est surtout une vision court-termiste. Il y a des clubs qui pourraient choisir de garder leurs bons joueurs, miser sur la stabilité, ou explorer d’autres zones géographiques pour leur recrutement. Mais non. 90% des clubs français visent les mêmes profils avec les mêmes budgets. Ils rêvent tous d’un modèle à la Brighton, mais Brighton, eux, utilisent la data et mettent 15 à 20 millions sur les bons joueurs. Ce que nous, aujourd’hui, on ne peut pas faire."
La Ligue 1 conserve-t-elle une forme d’attractivité ?
"Oui, mais très ciblée. Elle attire encore les jeunes joueurs, qui la considèrent comme un tremplin. Ils savent qu’ils auront du temps de jeu, ce qui peut les amener rapidement vers la Premier League ou des clubs européens plus huppés.
Mais cette stratégie, on la retrouve aussi aux Pays-Bas ou en Belgique. Un jeune joueur peut faire deux saisons là-bas, performer, et signer en Premier League. La Ligue 1 n’a plus l’exclusivité de ce rôle de tremplin."
"C’est un vrai souci. Le football français souffre d’une image de désordre, de chaos. Ce "bordel ambiant" — désolée du terme — est relayé à l’étranger. Les joueurs, agents et clubs se demandent : est-ce que les clubs français sont financièrement stables ? Est-ce que le championnat est bien diffusé ? Est-ce qu’il y a une vraie exposition médiatique ? Tout cela compte dans la décision d’un joueur. Et aujourd’hui, la Ligue 1 n’est clairement pas en tête de gondole des destinations préférées.
Le football français est à la fois à court de moyens… et d’idées. Ce n’est pas qu’une question de budget. C’est une question d’ambition, de stratégie, d’anticipation. On ne peut pas sortir de cette crise en espérant que la data ou un bon logiciel vont tout régler. Il faut reconstruire, et ça passe par une vraie réflexion sur notre modèle."