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·19 novembre 2025
Dans les coulisses de "ASSE, une histoire de légendes"

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·19 novembre 2025

Avec "ASSE, une histoire de légendes", Clément Goutelle retrace en BD les moments forts et les grandes figures des Verts. Avec nous, il revient sur la naissance du projet et sa réalisation.
Quelle est votre relation avec l’ASSE ?
D’abord, je suis né à Saint-Étienne, je suis stéphanois et de fait le virus de l’ASSE se transmettant de génération en génération, j’ai été touché. Ainsi j’ai toujours suivi les résultats, les matchs, j'étais abonné durant mes années Lycée jusqu’au début de ma vie d'adulte. Puis quand j’ai commencé mon activité de journaliste, j’ai démarré par la presse sportive. Depuis la période Puel (ndlr, 2019-2021), je suis suiveur de l’ASSE pour le Dauphiné libéré et en parallèle je suis journaliste indépendant depuis plus de 10 ans au Progrès.
Qu’est-ce qui vous a donné envie de raconter l’histoire de l’AS Saint-Étienne sous forme de bande dessinée plutôt qu’un livre illustré ou un documentaire classique ?
La BD est un média que j’aime bien, j’avais déjà fait le scénario d’une autre bande dessinée sur un sujet qui n’a rien à voir, "Somaliland", c'était le portrait d’une résistante somalilandaise. J’aime beaucoup ce média, ça faisait très longtemps que cette idée trottait dans ma tête de faire une BD sur l’ASSE. Il y a eu deux choses concomitantes, le fait que le club passe sous pavillon étranger quand il a été racheté par Kilmer, je me suis dit qu’il était temps de faire un point sur toute cette histoire et essayer de faire un portrait de l’histoire de ce club. Dans le même temps, il y a environ trois ans, j’ai rencontré Michel de Jarjille éditions qui est un éditeur de Saint-Étienne avec qui j’ai sorti la BD "Somaliland". Il me dit qu’il veut lancer une série de livre qui s'appelle "La Belle 42". L’idée est de mettre en avant l’histoire du territoire de Saint-Étienne, de la Loire en générale en sortant tous les trimestres une nouvelle BD. L’ASSE est le premier volet pour le lancement de la série. Dans cette BD, on a voulu montrer cette passion qu’il y a autour du club.
Philippe Gastal est le fil conducteur de l’histoire, comment cette idée a-t-elle émergé ?
Il me fallait une personne emblématique qui représente bien cette passion démesurée. En bossant sur l’ASSE, j’ai rapidement rencontré la mine d’informations sur le club : Philippe Gastal, le conservateur du musée et historien officiel de l’ASSE. J’ai tout de suite eu envie de le mettre au centre de la BD. Pour raconter plus de 90 ans d’histoire, il me fallait un lieu puis un prétexte. Assez simplement, le lieu emblématique qui a vu toutes les grandes heures du club, c’est le Stade Geoffroy-Guichard. Il permet de relier toutes les périodes du club. Le prétexte était une visite du club avec Philippe Gastal et des supporters. Cela a permis de raconter de nombreuses anecdotes et plusieurs périodes de l’histoire du club.
Combien de temps a duré la réalisation complète de l’ouvrage ?
Une bande dessinée est très longue à faire, ça fait plus de deux ans que nous sommes dessus. Pour tous et toutes c’est plus de deux ans de travail.
Comment avez-vous travaillé pour rassembler les informations historiques sur le club ?
Ça fait quand même un moment que je travaille sur l’ASSE. Au fil des différents articles que j’ai faits, j’ai eu la chance et l’occasion de pouvoir interviewer de nombreux joueurs comme Rijvers ou Salif Keita par exemple, mais ma source première c’est le musée et Philippe Gastal. J’ai commencé avec une interview de Philippe avec les éléments et les anecdotes que j’avais envie de mettre en avant dans la BD et puis nous avons fait une vraie visite du musée en sa compagnie avec Olivier Paire, le dessinateur.
Comment avez-vous choisi les moments clés à raconter sans tomber dans la simple nostalgie ?
L’idée était de dérouler le fil des premières années du club à aujourd'hui et de sortir des anecdotes parfois inconnues des connaisseurs de l’AS Saint-Étienne. Tout le monde y trouve son compte. Souvent les livres de l’ASSE parlent d'une période bien précise et à 99% du temps, de l’épopée de 1976. C’est la pierre angulaire de l’histoire. Mais sa légende remonte à un premier exploit qui s’est déroulé bien avant. Je voulais raconter d’autres histoires que celles de 1976.
J’ai essayé de mettre en avant, les hommes de l’ombre, notamment ceux qui ont des tribunes à leur nom au stade. Évidemment, on n’oublie pas l’épopée, mais on l’évoque de manière plus succincte car tout le monde sait déjà tout de cette époque. J’ai cherché à faire le lien avec les nouvelles générations qui eux, ne la connaissent peut-être pas parfaitement. Et puis pour ma génération, les périodes les plus fastes de l’ASSE se résument à quelques titres de Ligue 2, des victoires dans des derbys et quelques matchs de Coupe d’Europe avec Galtier. En fait, les périodes Nouzaret, Antonetti, Galtier sont les plus parlantes pour les gens de ma génération. Un but de Bridonneau a eu une saveur particulière, cela reste un temps fort quand tu as 40 ans aujourd’hui.
Quelles sont, selon vous, les périodes les plus emblématiques du club que vous teniez absolument à mettre en avant ?
Pour moi, la période où j’ai vraiment vibré est cette période du début des années 2000. Ce qui était marrant, c’est que pour Philippe Gastal et sa génération, l’ASSE c’est le grand club, le club qui gagne. Nous on n'a jamais connu ça, c’est plutôt un club qui perd. Il fallait justement essayer d'expliquer comment cette passion arrive à perdurer et se transmettre malgré des périodes plutôt délicates avec parfois aussi des émotions qui arrivent à travers des défaites. Le match contre Bâle représente bien cette passion pour le club où tu vibres à 100% avec beaucoup de joie, d’émotions et au final pas mal de déception (ndlr, saison 15/16 en 16e de finale de Ligue Europa).
Qu’est-ce qui, selon vous, rend le club de Saint-Étienne si particulier pour ses supporters ?
Cet esprit de transmission et le fait qu’il ne s’explique pas. Il y a aussi un point de vue territorial avec des sections qui se regroupent dans toute la France, il y en a même une à Tahiti. L’épopée de 1976 était il y a 50 ans, c’est quand même fou qu’il y ait encore un tel engouement autour du club. Cette passion est déraisonnée.
Quel était votre parti pris graphique : recréer l’ambiance des années 70 ou moderniser le regard sur le club ?
On voulait un truc qui touche toutes les générations, un peu comme la passion du club. Il y a un côté à la fois scène de jeu où il y a beaucoup d’actions pour que ça fasse un peu "manga" mais aussi un côté réaliste et notamment dans les décors afin que l’on soit vraiment plongé dans les travées du Chaudron. La BD permet de mettre un visage sur plein de joueurs, plein de périodes. C’est ça l'avantage et c’est pour ça que j’ai choisi un dessin un peu réaliste. Sur le côté artistique, j’ai laissé beaucoup de liberté à Olivier Paire qui a amené un petit côté déluré, il a apporté son univers, et c’est aussi le but de collaborer avec un dessinateur.
J'avais confiance sur le fait qu’il pouvait apporter des choses auxquelles je n’ai pas forcément pensé, par exemple, le fait de mettre les onze de 1976 sur le passage piéton d'Abbey Road un peu comme les Beatles parce que pour lui c’était des rockstars. Il a eu plutôt carte blanche pour apporter sa narration, ce n'est pas juste des cases linéaires dans toutes les planches. Il a fait un découpage très particulier qui est plus dynamique. J'ai apporté le fond et lui la forme. On a pu compter sur Philippe Gastal et son regard avisé pour être très précis sur les maillots, les époques, notamment quant aux représentations du stade dans l’histoire.
Il y a une scène ou une planche dont vous êtes particulièrement fier ?
J’aime bien une planche imaginée avant la BD lors de notre visite avec Philippe Gastal. C’est celle quand on arrive dans le vestiaire. Je voyais le vestiaire à la fois de la période Sablé, de Bridonneau, de Bayal Sall se mélanger à celui de Stassin, d'Aubameyang mais aussi à celui des Larqué, Piazza, Keita ou Mekhloufi. Avoir une représentation de toutes les générations en un seul endroit, le vestiaire du stade Geoffroy-Guichard. J’avais cette image en tête, j’ai donc une affection particulière pour cette planche. On y trouve des joueurs qui n’ont pas la même carrière et la même importance dans l’histoire de l’ASSE mais ils sont ensemble.
Si vous deviez résumer "ASSE, une histoire de légendes" en trois mots, lesquels choisiriez-vous ?
Passion, victoire et échec. L'histoire du club est construite par des échecs, je pense notamment à celui de la fin des années 30 où Pierre Guichard avait voulu construire une équipe à grand coup de millions de francs. Ce n'était pas les mêmes sommes qu'aujourd'hui mais on la surnommait l’équipe des millionnaires, il avait fait venir des joueurs étrangers comme Ignace Tax. C’était à la fin des années 30 et le club était en deuxième division et ils avaient échoué à monter durant plusieurs saisons. Grâce à cet échec-la, Pierre Guichard a commencé à se dire qu’il fallait structurer le club et miser sur la formation, c’est là où a commencé à germer cette nouvelle ère. C’est l’une des premières pierres qui va permettre l'épopée de 1976. Ensuite, victoire parce qu’il y a eu de très grandes victoires, et enfin passion parce que c’est ce qui fait la force de l'ASSE et porte le club depuis des années.
Peut-on espérer une suite, ou un autre projet autour du football et de la culture populaire stéphanoise ?
Dans cette collection La Belle 42 , j’ai prévu une bande dessinée sur Mélanie Volle, une résistante âgée de 104 ans, qui habite Saint-Étienne. Ce sera en deux tomes : Liberté (tome 1) et Résistance (tome 2). C’est une femme avec une vie incroyable qu’on va essayer de raconter en BD avec un dessinateur. Par rapport au football, j’ai une très grande envie de raconter la vie d'Aimé Jacquet.









































